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L’Egypte et la leçon donnée aux Etats-Unis

L’Egypte et la leçon donnée aux Etats-Unis
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Par Soraya Hélou

L'incroyable est arrivé. A peine un an après son élection -à l'arraché il faut bien le préciser-, le président égyptien Mohammed Morsi a été démis de ses fonctions par l'armée égyptienne à la demande d'une foule immense, puisque fait inégalé dans l'histoire du monde, près de 33 millions de personnes sont descendues dans la rue, dans toutes les provinces de l'Egypte. Les Egyptiens, et en particulier les jeunes, ont montré ainsi qu'ils n'acceptaient pas que leur révolution soit confisquée et détournée de ses objectifs et que rien ne peut les effrayer, ni la puissance des Frères musulmans, ni surtout le fait qu'ils bénéficient de l'appui des Américains. Il faut signaler à cet égard que l'ambassadeur des Etats-Unis au Caire, Mrs Ann Patterson, qui avait été longtemps diplomate au Pakistan appuie ouvertement les Frères musulmans et a beaucoup influé sur son administration pour la convaincre de tenter cette aventure en Egypte. Mrs Patterson défendait la thèse selon laquelle après les régimes dictatoriaux devenus indéfendables et fragilisés à l'extrême, il est temps de donner une chance aux Frères musulmans, sur le modèle de la Turquie ou du Qatar, qui, tout en prônant un islam strict et sévère, entretiennent de très bonnes relations avec les Etats-Unis et sont pacifistes à l'égard d' «Israël». Bien entendu, pour les Américains, l'aspiration à la démocratie est un prétexte et ils n'ont jamais considéré que les peuples de la région méritaient une véritable liberté et la souveraineté dans leurs décisions.

Les Etats-Unis ont donc appuyé l'arrivée au pouvoir de Mohammed Morsi et ont fermé les yeuxL’Egypte et la leçon donnée aux Etats-Unis devant ses dérapages autoritaires et sa volonté de confisquer le pouvoir en sa faveur, aux dépens de l'armée, de la population et des promesses de démocratie qu'il avait faites. Ils croyaient pouvoir faire avaler la pilule au peuple égyptien, tout en se présentant comme les véritables défenseurs de la démocratie, puisqu'ils ont appuyé la volonté de changement chez la population en abandonnant leur allié Hosni Moubarak, en faveur d'un président démocratiquement élu. Mais furieux de voir leurs aspirations bafouées, les Egyptiens sont donc descendus dans la rue et avec le soutien de l'armée, ils ont réussi à obtenir le départ de Mohammed Morsi. Pourtant dans un premier temps, les Etats-Unis par la voix de leur ambassadrice au Caire ont continué à exiger son retour au palais présidentiel, sous prétexte qu'il a été démocratiquement élu. Mrs Patterson a même été jusqu'à proposer un scénario selon lequel Mohammed Morsi reviendrait au palais présidentiel et présenterait lui-même sa démission, pour préserver «les règles démocratiques», mais les forces d'opposition et l'armée ont flairé le piège et rejeté cette mise en scène, préférant maintenir le président déchu dans un lieu de détention sûr et mettre au point le scénario de la transition.

Certes, l'expérience égyptienne n'est pas encore achevée et les affrontements des derniers jours montrent que le scénario sanglant plane toujours sur l'Egypte, certaines factions des Frères musulmans préférant plonger le pays dans un bain de sang plutôt que de céder le pouvoir. Mais une chose est sûre les Egyptiens ont une fois de plus, surpris tout le monde et renversé la donne. Lorsque 33 millions de personnes descendent dans la rue, nul ne peut ignorer leur volonté et le train du changement ne peut que se mettre en marche. En moins de temps que prévu, les Frères musulmans ont montré ainsi leur incapacité à exercer le pouvoir, même s'ils s'y préparaient depuis des années dans la clandestinité et qu'ils avaient réussi à convaincre les Américains et les Européens de leur légitimité. Ils ont essuyé un premier coup en Turquie avec les manifestations contre le Premier ministre Erdogan qui ont ébranlé son pouvoir et compromis la réélection de son parti en 2014. Ils ont ensuite essuyé un nouveau coup avec le changement à la tête du pouvoir au Qatar ou le l'émir Hamad ben Jassem a dû abandonner le trône à son fils Tamim. Ce qui compte dans cette transition, c'est le fait qu'avec son intervention en Libye, en Syrie, en Tunisie et en Egypte, l'émir du Qatar avait dépassé le rôle qui lui avait été confié et commençait à se prendre pour le chef de la région, confisquant la Ligue arabe et cherchant à imposer sa volonté. IL a fallu le rappeler à l'ordre et obtenir de façon élégante le départ du Premier ministre, tout en ramenant le petit émirat à sa dimension véritable. Et avec le départ de l'émir son fameux projet pour le Liban s'est envolé en fumée, avec le coup de force de l'armée contre cheikh al Assir, après l'attaque de ce dernier contre le barrage militaire à Abra. Cette attaque, il faut le rappeler est intervenue au lendemain de l'annonce par le Premier ministre du Qatar avant son départ, de « la prise de décisions secrètes au sein de la Ligue au sujet de la Syrie et de l'intervention du Hezbollah aux côtés du régime syrien ». Tous ces changements presque simultanés ne peuvent pas être ignorés car ils signifient essentiellement la fin rapide du projet des Frères musulmans au pouvoir qui avait été adoubé par les Etats-Unis et l'Union européenne. Grâce à l'Egypte notamment, une nouvelle ère s'ouvre pour la région qui, si elle comporte encore beaucoup de pièges et de dangers, prouve que l'accord des Etats-Unis ne suffit plus à appliquer un plan qui n'a pas l'aval du peuple concerné.

Source : French.alahednews

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