Le Hezbollah appelle à suspendre tous les protocoles avec le TSL jusqu’à la formation du nouveau gouvernement
Conférence de presse du chef du bloc parlementaire de la résistance hajj Mohammed Raad
Nous avons voulu tenir cette conférence de presse pour commenter un sujet unique qui concerne les nouvelles demandes du procureur général du TSL Daniel Bellemare à certains ministères pour obtenir des documents sur leur travail portant sur l’ensemble du peuple libanais sous le couvert de l’enquête internationale sur l’assassinat du premier ministre martyr Rafic Hariri. Ces demandes ont suscité une opposition des ministres concernés et soulevé des questions au sujet de leur légalité et elles ont confirmé les doutes au sujet de l’objectif réel recherché par le procureur, d’autant qu’elles constituent une violation de la vie privée des Libanais consacrée par la Constitution et aboutissent en définitive à violer les particularités de la patrie et des citoyens.
Certains ont tenté d’expliquer que le fait de répondre à ces demandes est une affaire élémentaire, allant même à présenter celui qui hésite à le faire comme s’inscrivant hors de l’Etat et de la légalité internationale. Pourtant, ces demandes interviennent plusieurs années après le crime et quelques mois après la remise de l’acte d’accusation au juge de la mise en état, à un moment historique au cours duquel le monde arabe et la région traversent des bouleversements et sont à la veille de changements. Ce qui conforte les doutes sur la politisation de l’enquête.
Pour que le peuple libanais ne soit victime de la désinformation et du non respect des ses droits, sous quelque prétexte que ce soit, nous avons estimé en tant que représentants du peuple et en tant que bloc parlementaire qu’il était nécessaire d’exposer la réalité de ces demandes et notre position à leur égard.
Nous avons déjà expliqué dans de précédentes conférences de presse que la formation du TSL, son statut et ses règles de procédure sont illégaux et anticonstitutionnels. Ils sont aussi en violation des intérêts des Libanais et sont fabriqués en fonction d’intérêts étrangers. Ces demandes sont aussi une nouvelle preuve du fait que ce tribunal est politisé et fonctionne sur une base arbitraire qui ne respecte pas les critères élémentaires de la justice.
Nous en avons déduit qu’il ne faut attendre aucune justice de la part de ce tribunal. Au contraire, nous ne serions pas étonnés s’il était un pont pour arriver à de nouvelles tutelles internationales sur le Liban, sa sécurité, sa stabilité et sa souveraineté. Cette impression se confirme chaque jour un peu plus pour nous et pour une grande majorité des Libanais.
Ce que nous allons commenter aujourd’hui conforte cette impression car les demandes présentées par le procureur sont en violation d’une part du protocole d’entente signé avec le gouvernement libanais et d’autre part de la souveraineté nationale.
1-Concernant la violation des règles de procédure et du protocole d’entente signé avec le gouvernement libanais :
-Il n’existe aucun point dans les différents protocoles d’accord signés avec le gouvernement libanais obligeant celui-ci à répondre à de telles demandes. Aussi bien dans le protocole d’entente que dans les statuts du TSL portent sur une coopération dans le cadre du mandat accordé au tribunal. Selo l’article un du statut, ce mandat englobe exclusivement les personnes impliquées dans l’attentat du 14 février 2005 et ceux qui l’ont suivi dans la période s’étendant du 1er octobre 2004 au 12 décembre 2005.
-La règle 16 des règles de procédure définit le système de preuves comme suit : s’il apparaît au procureur qu’une agression peut être placée dans le cadre du mandat du TSL selon l’article premier des statuts et que cette agression fait l’objet de poursuites devant les tribunaux libanais, il peut demander aux autorités libanaises compétentes de lui transmettre toutes les informations concernant cette agression.
-Le protocole d’entente signé entre le procureur et le ministre libanais de la justice en juin 2009 stipule ce qui suit : le gouvernement libanais s’engage à assurer l’entière liberté au procureur dans le cadre de son enquête au Liban et il s’engage à lui assurer une coopération totale dans l’accomplissement de sa mission. Cette coopération porte sur le fait de lui remettre le plus rapidement possible tous les documents, les dépositions et les informations matérielles ainsi que les indices en possession des institutions libanaises au sujet des affaires comprises dans le mandat du TSL… Ce qui signifie que les demandes concernant des informations sur tous les Libanais depuis plus de 5 ans sont en violation flagrante des dispositions des statuts et du protocole d’entente car elles dépassent le mandat confié au procureur et qui est limité à l’attentat du 14 février 2005.
2-Concernant la violation de la souveraineté nationale :
-Le fait de remettre des informations privées et personnelles sur une large partie de la population viole la vie privée de tout un peuple pour un crime politique visant une personne.
-Or, la vie privée des Libanais fait partie des libertés publiques préservées par la Constitution dans son préambule. Ne pas la respecter constitue une violation flagrante de la souveraineté et place un peuple entier à la merci de parties incontrôlées.
-Cette demande est aussi une violation des lois citées dans la Constitution sur les droits fondamentaux et les libertés publiques. Il s’agit notamment d’une violation de la loi sur l’interception des télécommunications, celle-ci exigeant en principe une autorisation des autorités compétentes limitée dans le cadre d’une enquête judiciaire. En d’autres termes, il ne peut y avoir de commission rogatoire ouverte, d’autant que la loi considère une telle demande comme une exception à des principes constitutionnels consacrés. Or l’exception doit être interprétée de manière restrictive.
Les demandes formulées par le procureur Bellemare portant sur des informations précises et globales concernant l’ensemble des Libanais ne peuvent se justifier dans le cadre d’une enquête criminelle individuelle. Il s’agit donc d’une violation systématique des droits du Liban et des Libanais.
Que personne ne croit que nous sommes en train d’exagérer les dangers de ces demandes ou que nous sommes en train d’amplifier l’impact de cette question. Il s’agit d’une affaire très grave. Nous vous soumettons maintenant des exemples des informations réclamées pour que les Libanais prennent conscience de l’ampleur de la violation de leurs questions privées.
Les enquêteurs ont obtenu au cours de la période précédente les informations suivantes :
1-Les communications des téléphones portables et les sms envoyés et reçus depuis 2003.
2-Les cartes prépayées et celles des téléphones fixes ainsi que les relevés de tous les abonnés d’Ogero.
3-Les dossiers des étudiants dans les universités de 2003 à 2006.
4-Les photos et les empreintes digitales et oculaires de toutes les personnes arrêtées par les forces de l’ordre.
5-Des empreintes prises auprès du service des passeports à la Sûreté générale.
6-La liste complète des abonnés de l’EDL.
7-Des milliers de documents du département de la circulation, des affaires géographiques, des ministères des Finances et de l’Economie ainsi que de la Banque centrale, du registre commercial, du ministère du Travail, des hôpitaux du casino du Liban, en plus d’adresses multiples.
Aujourd’hui, le procureur réclame en plus de tout cela, les empreintes digitales de 4 millions de Libanais dont celles du président de la République, du président de la Chambre, des présidents du Conseil, des députés, des ministres, de leurs épouses, des dignitaires religieux, des militaires des sœurs, bref de tout le monde.
Une personne ayant le sens de la dignité peut-elle accepter cela ? De même, le procureur demande les formulaires de tous ceux qui possèdent une voiture et qui détiennent des permis de conduire.
Ces demandes sont suspectes et portent les empreintes d’une action des services de renseignements d’une ampleur inégalée. Grâce à notre longue lutte contre l’ennemi israélien et après le fait que l’ampleur de son infiltration libanaise sur la scène libanaise soit devenue claire, nous comprenons l’importance de ces demandes et l’objectif recherché de fragiliser le Liban et tous les Libanais. Nous posons encore quelques questions qui pourraient mettre en lumière les motifs cachés derrière ces demandes :
1-En quoi toutes ces informations sur l’ensemble du peuple libanais et leur mise à jour régulières sont-elles utiles pour l’enquête internationale ?
2-Pourquoi le procureur réclame-t-il maintenant ces informations alors qu’il a remis l’acte d’accusation au juge de la mise en état ?
3-Qui peut garantir la non divulgation de ces informations comme le furent les fuites de l’enquête internationale ?
L’ampleur de la corruption, de la politisation et de l’absence de secret de cette enquête, nous pousse à douter de toutes les démarches. D’ailleurs qui nous dit que les informations déjà parvenues au procureur ne sont pas déjà entre les mains d’Israël ? Nous avons déjà obtenu quelques indications à ce sujet à travers notre surveillance de l’action sécuritaire israélienne au Liban.
4-Le peuple libanais sait-il que parmi les enquêteurs internationaux, il y a des personnes de nationalités différentes (Américains, britanniques, allemands, français, australiens, pakistanais et kazakhs…) ? Nous connaissons les intentions cachées des principaux d’entre eux qui tiennent les rouages du bureau de Bellemare, tout comme nous connaissons les liens de certains d’entre eux avec des services de renseignements internationaux hostiles à la résistance. Nous savons aussi que les services de renseignements américains ont tenté par le biais d’accord non constitutionnels signés avec des services libanais à se procureur certaines informations délicates sans succès. Ces informations sont désormais réclamées par le biais du TSL ;
5-Qui peut garantir le fait que ces informations ne seront pas transmises à des services de renseignements en conflit entre eux ou aux services israéliens et qu’elles ne seront pas utilisées pour semer la discorde ou fabriquer des éléments qui serviront de moyen de chantage contre tel responsable ou telle partie ?
6-Un rappel enfin : le bureau du procureur n’a pas encore répondu à la question suivante : a-t-il lui ou la commission d’enquête transmis des informations aux Israéliens ? Nous pensons que la réponse est évidente et n’exige aucune précision.
En conclusion, il apparaît que l’enquête internationale est la plus grande opération de tutelle et de piraterie connue par le Liban moderne.
Il n’est donc plus admis que le Liban puisse être bafoué de cette manière. De la tribune du Parlement, j’appelle tous les hommes libres, les nationalistes et les personnes dignes à assumer leurs responsabilités et à cesser de coopérer avec les demandes du TSL car elles constituent une violation de notre constitution, de notre souveraineté et de nos droits fondamentaux.
Au sein du bloc de la résistance, nous nous tenons aux côtés des ministres qui ont assumé leurs responsabilités avec courage et dignité face aux violations de la Constitution, en évitant de tomber dans le piège qui leur était tendu. Nous les pressons de ne pas céder aux pressions étrangères et internes, visant à affaiblir le Liban et à le transformer en bouchée facile à avaler dépourvue de toute composante de souveraineté.
Nous disons aussi en toute clarté: il faut suspendre l’application des protocoles d’entente signés entre le TSL et le gouvernement, jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement qui assumera la responsabilité d’étudier toutes les formules existantes et de prendre une décision nationale à ce sujet.
Question: Des sources proches du Premier ministre Mikati ont révélé sa crainte de l’adoption d’une résolution du Conseil de sécurité sous le chapitre 7 concernant le comportement des ministres qui n’ont pas coopéré avec Bellemare, sur la base d’une incitation de la part de Libanais. Confirmez-vous cette impression?
Réponse: Je voudrais d’abord dire que la volonté de placer le Liban sous le chapitre 7 de l’Onu est une action irresponsable et qui dénote un manque total de sentiment national. Car cette action ne touche pas une partie du Liban et des Libanais mais l’ensemble du pays. En tout état de cause, le Liban et son peuple sont placés sous le chapitre 7 depuis que les forces internationales ont semé l’entité sioniste en Palestine et nous nous sommes retrouvés en situation de conflit permanent avec cette entité et avec ses protecteurs.
Au sujet des protocoles d’entente, le député Raad a expliqué que rien n’oblige un ministre ou un responsable à répondre à des demandes dont la légalité, l’utilité et la constitutionnalité sont contestées. Il n’a qu’à les laisser jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement. Hajj Raad a refusé de donner des indications sur le contenu de la déclaration ministérielle du prochain gouvernement, affirmant qu’il dépendra des ministres du nouveau gouvernement.
Traduction: Soraya Hélou
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