Trump célèbre la «paix par la force»: un triomphalisme exagéré sans aucune vision de l’avenir

Par Assia Husseini
Dans une ambiance de festivité exagérée, le président américain Donald Trump a été accueilli en «Israël», où il a prononcé un discours devant la «Knesset», célébrant la victoire d’«Israël» face à ses «ennemis».
Il a estimé que la guerre n’aurait pas pu atteindre ses objectifs sans les atouts militaires et politiques réalisés par «Israël» à Gaza, face à l’Iran et au Hezbollah au Liban.
Trump a déclaré que cette journée représentait «une aube historique pour la région», affirmant que la «paix avait été imposée par la force», et que «l’accord de Gaza» ouvrait la voie à une ère «exceptionnelle» pour «Israël» et le Moyen-Orient.
Trump s’est ensuite rendu à Charm el-Cheikh pour signer l’accord de Gaza, lors d’un rassemblement réunissant plus de 31 dirigeants et représentants d’organisations internationales, dans ce qui a été présenté comme une déclaration d’une nouvelle ère régionale, baptisée «Paix 2025».
Néanmoins, de nombreuses questions demeurent sans réponse concernant l’avenir de la bande de Gaza, la reconstruction, le projet de désarmement de la résistance, et même la question des deux États, évoquée pendant le sommet par l’hôte égyptien, le président Abdel Fattah al-Sissi.
«Le sommet semble avoir mis fin à la guerre, mais il n’existe aucune vision pour l’avenir de la région», a déclaré la professeure de sociologie politique Dr Hoda Rizk.
À la «Knesset», Trump a affirmé avoir soutenu «Israël» avec les armes les plus avancées, qu’il a lui-même testées sur les Gazaouis. Il a reconnu, dans une interview à la presse, qu’il y avait eu 60 000 victimes. Quelques heures plus tard, à Charm el-Cheikh, il était célébré comme un «artisan de la paix», encensé par certains responsables arabes et musulmans.
«Il s’est même autoproclamé pacificateur», a indiqué Dr. Rizk, ajoutant : «Les accords d’Oslo avaient été célébrés avec une ferveur bien plus grande et signés à la Maison-Blanche, mais ni les sionistes ni les Américains ne les ont respectés.
Ce n’est qu’une nouvelle vague d’illusions, une trêve en préparation d’une nouvelle catastrophe.»
Dr. Rizk soulève que ni la question d’al-Qods (Jérusalem), ni celle de la Cisjordanie, ni même la solution à deux États n’ont été réglées.
Il ne s’agit, selon elle, que de la fin de la guerre de Gaza et de l’échange de prisonniers. Elle voit ce sommet comme une confirmation de ce que Washington avait déjà obtenu en 2022 lors d’une réunion diplomatique avec les pays de l’axe américain, dont Aliyev et Pachinian, dans un message adressé à l’Iran et à Moscou.
Et qu’il s’agit également d’un moyen de rapprochement entre l’Inde et le Pakistan, adressé cette fois au sommet de Shanghai.
«Trump estime ainsi déterminer la position du Moyen-Orient, qui, selon lui, le soutiendra dans son futur embargo pétrolier contre la Chine. Le sommet a mis fin à la guerre, mais il n’a pas instauré la paix», affirme Dr. Rizk.
La lecture palestinienne : entre récupération politique et absence d’horizon
De son côté, l’écrivain palestinien Adnan Al-Sabbah considère que «le but réel de tout ce qui s’est passé est le retour des prisonniers ; le second objectif, tout aussi important, est de sortir Israël de son isolement international, après qu’il est devenu ostracisé et marginalisé. »
Selon lui, la situation d’«Israël» devenait de plus en plus dangereuse et enracinée, et si la guerre s’était poursuivie, il aurait pu devenir un «État» rejeté par la quasi-totalité des pays du monde, y compris par l’opinion publique américaine.
Ni les États-Unis, qui auraient été associés à cette image, ni «Israël» lui-même n’avaient intérêt à cela. «Il fallait donc mettre fin à la guerre pour atteindre ces deux objectifs», explique-t-il.
M. Al-Sabbah ajoute: «Trump n’a d’autre préoccupation que la mise en scène et l’autopromotion. Il cherche à se présenter comme un héros, artisan de la paix, à travers cette célébration théâtrale. Mais souvenons-nous de l’expérience de janvier : dès que la phase relative aux prisonniers s’est terminée, l’accord tout entier s’est effondré.»
En réalité, «Israël» a imposé de nouvelles conditions liées à la remise des corps des prisonniers, et commence à évoquer le blocage de l’ouverture du point de passage de Rafah en échange de leur restitution. Cette évolution fait craindre de nouveaux problèmes, alors qu’il demeure impossible de prévoir la suite des événements.
Des garanties fragiles et des promesses incertaines
Le mouvement de résistance Hamas semble avoir reçu des assurances des États médiateurs selon lesquelles il n’y aurait pas de retour à la guerre, du moins pas à la guerre d’extermination qui a duré deux ans. M. Al-Sabbah confirme que «la résistance s’appuie sur les garanties offertes par les médiateurs — devenus désormais garants — à savoir l’Égypte, le Qatar et la Turquie. Ce sommet pourrait ouvrir une nouvelle perspective politique pour la cause palestinienne et les droits nationaux du peuple palestinien. Mais sans une réelle ouverture vers la concrétisation de ces droits, il ne saurait constituer une base solide pour la paix. Car la source même du conflit au Moyen-Orient reste la question palestinienne : tant que la racine du problème n’est pas traitée, aucune solution durable n’est possible.»
Le sommet, par ailleurs, n’a pas précisé comment seraient traités les points nécessitant une étude approfondie, tels que la question des armes, la reconstruction, ou la situation des citoyens dépourvus d’abris. Les institutions économiques, sociales et commerciales, ainsi que les terres agricoles, ont été anéanties, ce qui signifie que les bases mêmes de la vie ne sont plus viables. «Peut-on ignorer tout cela et transformer cette réalité en une vie normale, rapidement et simplement ?
Ou faudra-t-il encore des années, des étapes et des programmes interminables — comme après la guerre de 2014 et les promesses de reconstruction ? L’histoire va-t-elle se répéter ?», s’interroge Al-Sabbah.
Une paix en trompe-l’œil
Au-delà des discours triomphants et des images soigneusement mises en scène, le sommet de Charm el-Cheikh semble davantage relever de la communication politique que d’une réelle volonté de «paix».
Derrière les promesses de stabilité et les slogans d’une «nouvelle ère régionale», aucune réponse concrète n’a été donnée aux questions fondamentales : la reconstruction de Gaza, le désarmement de la résistance, la reconnaissance des droits du peuple palestinien ou encore la mise en œuvre d’un véritable processus politique.
Ce qui se dessine, au contraire, c’est une trêve fragile, portée par des équilibres précaires et des intérêts stratégiques qui dépassent la Palestine elle-même.
Le sommet, présenté comme un tournant historique, risque de n’être qu’un intermède diplomatique, destiné à redorer des images ternies et à calmer une opinion internationale de plus en plus critique.
Tant que la racine du conflit — l’injustice faite au peuple palestinien — ne sera pas traitée, aucune conférence, fût-elle régionale ou mondiale, ne pourra instaurer une paix véritable.
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