noscript

Please Wait...

La crédibilité du 14 mars sur la sellette

La crédibilité du 14 mars sur la sellette
folder_openAnalyses access_time depuis 13 années
starAJOUTER AUX FAVORIS

Soraya Hélou

S’il s’agit d’une bataille aux points, on peut dire que la majorité actuelle en a marqué plusieurs au cours de la dernière séance de dialogue national. Comme à chaque échéance importance, le 14 mars est ainsi contraint à revoir ses exigences à la baisse. Quelques jours auparavant, cheikh Saad Hariri avait clairement refusé toute invitation au dialogue. Mais le message du roi Abdallah adressé au président Sleiman et qui est arrivé directement à Baabda sans passer par le ministère saoudien des Affaires étrangères proposait au contraire au chef de l’Etat de réunir les différents protagonistes autour de la table de dialogue. Dans ces conditions, cheikh Saad ne pouvait que s’incliner devant la volonté de son roi, entraînant avec lui tous ses autres alliés du 14 mars.

Tous sauf un, le chef des Forces libanaises qui croit, en maintenant sa position de refus gagner en crédibilité auprès de ses partisans et se présenter devant les chrétiens comme le seul qui dit non et qui a une certaine autonomie. Samir Geagea se voit déjà dans un ou deux mois disant à ses partisans : vous voyez, le dialogue n’a mené nulle part et j’ai eu raison de ne pas y participer. Sauf que là, la situation est un peu plus délicate qu’une simple partie de cartes. Le Liban est au bord du gouffre, subissant en permanence la pression des développements en Syrie, alors que son tissu social interne est au bord de la déchirure, et certains font des calculs de petits boutiquiers, soucieux de gagner quelques voix électorales au prix du chaos. C’est là toute la différence entre les leaders qui ont un minimum de sens des responsabilités nationales et ceux qui ne voient le Liban qu’à travers le prisme étroit de leurs intérêts directs…

Finalement, la grande majorité des protagonistes se sont rendus à l’invitation du chef deLa crédibilité du 14 mars sur la sellette l’Etat et par sa tenue même, cette conférence est avant tout un acquis pour le Liban puisqu’elle montre aux excités dans la rue que le dialogue est maintenu et que rien ne justifie qu’ils en viennent aux armes, puisque leurs chefs se parlent entre eux. Elle est aussi un acquis pour le président de la République qui a, en quelque sorte, repris la main, après des mois au cours desquels tout semblait se dérouler sans lui et son rôle était devenu minimal.

Elle est encore un acquis pour le Premier ministre Négib Mikati qui s’est installé à la gauche du président en chef d’un gouvernement reconnu par toutes les parties y compris celles qui veulent prendre sa place et ne lui pardonnent pas de les avoir remplacées au sérail. Après la féroce campagne menée contre son gouvernement qualifié « scénario de coup d’Etat » et de « gouvernement du Hezbollah et de l’Iran »,  Mikati a ainsi obtenu une reconnaissance internationale et maintenant locale, à travers la participation du 14 mars à la réunion du dialogue où il assistait en tant que Premier ministre…

Mais au-delà des acquis de pure forme, la réunion du dialogue à Baabda a aussi permis à la majorité de marquer de nouveaux points politiques. Le communiqué final que le président Sleiman souhaite appeler « la déclaration de Baabda » pour marquer son importance, ne mentionne pas les armes du Hezbollah en dépit de la volonté déclarée du 14 mars qui depuis des années fait du désarmement du Hezbollah son fond de commerce populaire. De plus, le communiqué final rejette l’idée de créer une zone tampon au Nord du Liban en faveur de l’opposition syrienne, il condamne le trafic d’armes à la frontière libano-syrienne et souhaite éloigner le Liban de la politique des axes (autrement dit pas d’alignement sur l’axe anti-régime syrien et pas d’alignement non plus sur l’axe pro-régime syrien, sauf que pour l’instant et depuis l’éclatement de la crise syrienne, c’est dans le premier sens que cela marche vu que les pro-régime syrien ne font rien pour l’aider à partir du Liban).

Enfin et surtout, le communiqué de Baabda accorde toute sa confiance à l’armée pour contrôler les frontières, alors qu’au cours des dernières semaines, celle-ci a été la cible de violentes attaques de la part des partisans du Courant du Futur ou de leurs alliés au Nord.
 
S’il est vrai que le dossier des armes sera évoqué au cours de la prochaine séance du 25 juin, on peut aisément dire qu’à ce stade, c’est la majorité qui a marqué son avantage. Certes, cela ne signifie pas que la bataille est gagnée, loin de là, ni que les décisions prises dans le cadre de la déclaration de Baabda seront appliquées à la lettre. Mais il y a désormais un document officiel qui a été adopté à l’unanimité des présents que l’on pourra brandir à la face de ceux qui ne respecteront pas ses dispositions. A tous ceux qui parlent des armes palestiniennes hors des camps, on dira désormais et les armes au Nord du Liban ? Quel que soit le sort réservé aux prochaines séances de dialogue, le 14 mars a perdu lundi une bonne partie de son argumentation…et donc de sa crédibilité.

Comments

//