Le revers de la CIA au Liban (2)

Dans le premier épisode, nous avons évoqué en détails l'histoire de la défaite de la CIA au Liban grâce à l'action de l'organisation du Jihad islamique depuis 1983, date de l'attaque contre le siège de l'ambassade américaine à Beyrouth. La CIA avait reçu des coups durs de cette organisation sans pouvoir pour autant vaincre son nouvel adversaire sur la scène libanaise.
C'est ainsi que l'objectif primordial de la CIA au Liban est devenu la traque de l'organisation du jihad islamique qui a constitué dès lors le défi majeur pour les renseignements américains. Le danger du Jihad islamique a dépassé celui des renseignements soviétiques pour la CIA.
Dans les années 80, Washington est devenu obsédé par le Jihad islamique, lui imputant la responsabilité de toute attaque contre les intérêts américains dans le monde!
Les faits sur le terrain de cette confrontation a permis de conclure que:
1- L'ambassade américaine à Beyrouth comprenait tout le temps un siège reservé aux officiers de la CIA. La mort du directeur de l'agence au Proche-Orient Robert Eimz dans l'explosion à Ein Mreysseh en fut la preuve concrète.
2- Le siège régional de la CIA a été transféré de Téhéran à la capitale libanaise après la fermeture par la République Islamique du plus grand nid d'espionnage dans le monde en 1979.
3-Les agents de la CIA se déplaçaient au Liban sous de titres diplomatiques. William Beckley avait le titre de conseiller politique à l'ambassade lorsqu'il est tombé dans les mains du jihad islamique.
Le premier contact entre le Hezbollah et les renseignements américains a eu lieu juste après le massacre de Bir el Abed en 1985, qui a été commis par un mélange sécuritaire américano-libano-arabe. Le service de sécurité du Hezbollah a pu démanteler la cellule exécutive et a montré à l'opinion publique la structure complète du groupe auteur de l'attentat et tous ses liens.
Un leitmotiv américain
Mais le discours officiel américain avait évoqué un seul leitmotiv. Ils ont imputé toutes ces frappes à une seule personne dénommée "Imad Moughniyeh". Ce dernier est devenu aux yeux de Washington responsable de tout malheur qui frappe les Américains au Moyen Orient et même à l'extérieur.
Toutefois, les services américains n'ont présenté aucun signe tangible sur la véracité de leurs prétentions, au moment où ils ont connu une défaite inouïe au Liban. Les Etats-Unis ont dû demander l'aide israélienne pour recueillir des informations sur le sort de leur officier William Heguens, disparu au Sud Liban en 1988.
C'est pour cette raison qu'"Israël" a enlevé cheikh Abdel Karim Obeid de sa maison à Jibshit en 1989, alors que l'ennemi sioniste a prétendu que cet enlèvement est lié au pilote Ron Arad. "Israël" ne peut en aucun cas dire à son opinion publique qu'elle mène des opérations au service des renseignements américains.
Cette détérioration du travail des renseignements américains au Liban s'est poursuivie surtout après la fin de la guerre civile au Liban, la mise en œuvre de l'accord de Taëf et la prise en charge par la Syrie du dossier libanais à tous les plans notamment sécuritaire.
C'est à ce moment que les renseignements américains ont perdu un terrain d'action sûr dans la région de Beyrouth de l'Est.
Les Etats-Unis se sont contentés désormais d'accuser Moughniyeh de toute action sécuritaire anti-américaine dans n'importe quelle région, jusqu'à l'apparition d'un nouvel ennemi qui fut l'organisation d'Al-Qaïda. C'est alors que la CIA fut chargée de trouver le lien entre Imad Moughniyeh et Oussama ben Laden, mais en vain.
Ce changement fondamental dans l'action de la CIA au Liban a coïncidé avec l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri et le retrait de la Syrie du pays. A ce moment là, le Liban est devenu un terrain ouvert pour tous les renseignements étrangers.
La CIA a tenté de rechercher le Hezbollah au Liban, mais elle l'a retrouvé à partir de 2005 en Irak, après que les forces de l'occupation américaine eurent été attaquées avec force dans ce pays. La CIA a une nouvelle fois recouru à son ami israélien pour analyser les données recueillies de la scène d'opération. La conclusion fut que "Les attentats portent l'empreinte du Hezbollah, sur le plan de la tactique, ou de la nature des engins explosifs meurtriers". De plus, des informations ont fait état de l'arrestation de certains jeunes libanais accusés d' "appartenir au Hezbollah et d'entrainer des groupes de combattants irakiens pour viser les Américains", dont dernièrement le Libanais Ali Moussa Daqdouq.
Des sources d'espionnage diverses
Par ailleurs, le Hezbollah a mis à découvert des Américains portés en flagrant délit lors de la guerre de juillet 2006. Certains faits sont annoncés, d'autres ont été révélés par les "Israéliens" plus tard, et le reste a été dévoilé par le site Wikileaks. C'est ainsi que le Hezbollah a formé à partir de ses propres sources une vision complète sur le rôle des Américains en juillet 2006, qui peut être expliquée de la façon suivante:
1-La direction politique directe de la guerre à travers le suivi logistique de la chef du Département d'Etat américain Condolezza Rice, à partir de son bureau à Washington, passant les capitales concernées et arrivant au Conseil de Sécurité.
2-L'ouverture des dépôts américains devant les Israéliens pour les approvisionner de tout genre d'armes et de bombes intelligentes, transportés directement à l'entité sioniste via un pont aérien traversant Londres.
3-La présence de hauts officiers américains au commandement militaires israéliens pour en profiter dans la direction des opérations de guerre.
4-La fourniture à "Israël" de toutes les informations de renseignement collectées par les différentes sources américaines sur le Hezbollah et ses capacités militaires.
Ces sources de renseignements américains ont déployé tous leurs efforts pour aider "Israël" à frapper le Hezbollah de la façon suivante:
a-L'ambassade américaine, via tout son personnel, a collecté des informations et des faits sur le terrain ainsi que des données politiques et des consultations de différentes classes sociales libanaises, certaines d'entre elles sont hostiles à la résistance, d'autres neutres. C'est ce qu'ont révélé les comptes rendus des rencontres tenues par des ambassadeurs américains à Beyrouth avant et après la guerre de juillet, via le site Wikileaks. Ces rapports ont constitué une matière importante dans l'évaluation de la situation à Tel Aviv et Washington, et c'est à leur base que des décisions exécutives ont été prises au niveau de la guerre politique, militaire et sécuritaire.
b-Les satellites américains ont été mis au service des centres d'opérations militaires israéliens pour détecter les mouvements des combattants ou pour diriger les missiles sur les zones de la résistance.
c-Les deux réseaux de télécommunications de téléphonie mobile au Liban sont avérés complètement infiltrés par les services de renseignements israéliens et la CIA. Ces derniers étaient une source d'informations intarissables et l'un des moyens d'espionnage américain et israéliens sur les Libanais en général, afin de récolter des informations utiles sur le réseau des télécommunications de la résistance.
d-Le réseau de contrôle financier dirigé par Washington sous le prétexte de lutter contre le terrorisme. Tous les transferts de fonds sont ainsi détectés. Ceci permet à Washington et à son service de renseignements de poursuivre tout transfert financier "suspect" qui pourrait servir la résistance.
e-Les sources humaines se divisent en deux parties: la première dont a profité la CIA via ses relations officielles avec certains services sécuritaires libanais, ayant dévié de leur fonction principale à la suite de l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri et le retrait de la Syrie du Liban. Ces services ont été chargés d'espionner la résistance, ce qui a assuré aux Américains une source d'informations de façon "légale".
La deuxième source est la plus dangereuse et la plus difficile: le recrutement par la CIA d'agents dans les rangs de la résistance. L'annonce du secrétaire général du Hezbollah Sayed Hassan Nasrallah sur la présence de collaborateurs dans les rangs du Hezbollah a formé un nouvel épisode officiel du conflit entre la résistance et les renseignements américains depuis le démantèlement du réseau responsable du massacre de Bir el Abde en 1985.
La frappe - catastrophe
Le Hezbollah a commence à rechercher et à démanteler le réseau secret de la CIA au Liban. Quelques semaines seulement, les Américains ont reconnu que le Hezbollah a pu démanteler et arrêter 12 espions opérant sur la scène libanaise, sans avoir de lien avec le corps du Hezbollah. Il a ensuite révélé que le groupe d'officiers d'espionnage de la CIA dont le siège est l'ambassade américaine à Awkar. Ce groupe avait recruté des Libanais de différents niveaux politique, médiatique, financier, académique, administratifs et sanitaires, à la recherche d'informations sur la résistance, sa structure et ses capacités militaires.
Comme ses prédécesseurs, l'officier Patrick Mcfeely avait un titre diplomatique à l'ambassade pour diriger ce groupe, formé selon des sources occidentales de 20 espions. La résistance avait révélé les noms de certains d'entre eux, ainsi que leur date de naissance, leurs faux-noms, les lieux de leurs rencontres et les chantages financiers. Il a ensuite démontré comment toutes ces informations vont directement au Mossad israélien, et comment les officiers américains lient leurs agents directement à la direction du Mossad.
Cette réalité a poussé les anciens officiers de la CIA à critiquer avec virulence la CIA qui "ne sait pas se comporter avec un adversaire compétent, expérimenté et sophistiqué comme le Hezbollah". La CIA a quant à elle imputé cette défaite à des lacunes dans les activités des officiers de la CIA et non à la compétence du Hezbollah, pour minimiser les pertes.
Pour la CIA basée en Virginie, la possession par le Hezbollah d'informations détaillées sur ses officiers démontre que le corps de la CIA a été infiltré par le Hezbollah, ce qui a nécessité l'ouverture d'une enquête interne dans le service des renseignements américains.
La CIA a besoin de plusieurs années pour assumer la frappe catastrophique et réviser ses moyens d'action pour former ensuite de nouvelles équipes d'espionnage, face à un adversaire qui développe sans cesse ses capacités et ses techniques militaires et sécuritaires.
Selon Paul Matter, dans un rapport publié par l'institut "Foreign policy in focus", il s'agit de la plus grande frappe reçue par la CIA, une frappe qui freinera les capacités de la CIA à livrer à la Maison Blanche des informations de renseignement objectives et des analyses sur le mauvais timing des politiques israéliennes et américaines à la fois.
Selon la version officielle américaine, Imad Moughniyeh a dirigé la guerre de renseignements américains dans les années 80 au nom de l'organisation du Jihad islamique, et a vaincu ses hauts officiers régionaux, leur infligeant des pertes considérables. A l'époque, il n'y avait ni systèmes de communications mobile, ni réseaux d'internet, ni de programmes informatiques sophistiqués capables d'analyser en une très grande vitesse les informations audio-visuelles, ni de techniques de lutte contre l'espionnage.
Si les Américains étaient convaincus de leur version, ceci signifie qu'Imad Moughniyeh a laissé derrière lui un héritage de connaissances et d'expertise sécuritaire ayant permis à la résistance de dévoiler dans un délai record le plus grand réseau sécuritaire comprenant des officiers américains et leurs agents libanais.
Source: Alintiqad
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