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Sabra-Chatila : Des souvenirs qui ne sèchent pas

Sabra-Chatila : Des souvenirs qui ne sèchent pas
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Fatima Ali

Dans une petite boutique à l’intérieur du camp des refugiés palestiniens à Chatila (situé à Beyrouth-Ouest),  quelques hommes se sont rassemblés autour d’un café arabe pour discuter de la politique, de leurs rêves qui s’étendent pour toucher la Palestine, et de leurs conditions de vie minables. Le massacre de Sabra et Chatila, à son tour, demeure au cœur de leurs conversations quotidiennes, comme si le souvenir refuse de quitter leurs mémoires, surtout qu’aucun des auteurs de ce crime de guerre n’a toujours pas été condamné. Celui qui visite les deux camps de Sabra et Chatila ne peut s’empêcher de penser aux scènes du massacre qu’il a déjà vues ou aux descriptions qu’il a déjà entendues des survivants et des journalistes.

Sabra-Chatila : Des souvenirs qui ne sèchent pasLes journées du 16 au 18 septembre 1982 n’étaient pas comme les autres journées pour les Palestiniens et les Arabes et tous ceux qui croient à la légitimité de la cause palestinienne. Environ 1400 victimes palestiniennes dont un nombre de Libanais selon l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), 800 selon une commission d’enquête menée par « Israël », et 2000, selon le journaliste britannique Robert Fisk (qui en était témoin) ont été tuées de sang froid par « Israël » qui ne peut être innocenté par le simple fait de nier son rôle dans ce massacre.

Le 2 septembre 1982, les combattants palestiniens quittent le Liban vers la Tunisie. Le 14 septembre, Béchir Gemayel est assassiné après quelques jours de son élection comme chef de l’Etat libanais, une élection qui fût totalement supportée par l’entité sioniste. Dans la nuit du 14 au 15 septembre, l’armée israélienne investit Beyrouth-Ouest et encercle le camp de Chatila permettant aux « Forces Libanaises » (l’aile militaire des phalangistes à cette époque) d'y pénétrer pour faire un « nettoyage des terroristes ». Le 19 septembre, les résultats de cette « opération » apparaissent ; des femmes mortes dans leurs maisons, des dizaines de jeunes hommes abattus après avoir été alignés ou attachés contre un mur, des enfants égorgés et des femmes enceintes éventrées aux couteaux.

Ahmad Dawali, le responsable du front populaire de libération de la Palestine au camp de Chatila raconte pour moqawama.org que « les quelques groupes armés qui étaient toujours présents au camp (ne portant que des armes légères) avaient décidé de combattre, mais les notables du camp ne partageaient pas ce point de vue ; ils ont par contre décidé de mener des négociations avec les Israéliens ; ceux-ci sont sortis du camp sans jamais revenir. » Il révèle de même « qu’aucun des partis nationalistes palestiniens et libanais ne s’attendait à un massacre pareil, car les combattants palestiniens étaient sortis de Beyrouth suite à l’accord Philip Habib qui garantissait la sécurité des camps des réfugiés. »

De son côté, Mohamed Srour, l’un des survivants du massacre raconte que « la nuit du 16 septembre 1982, des groupes de militants ont envahi le camp, ceux-ci parlaient en arabe et étaient vêtus de tenues militaires israéliennes. Ils ont été soutenus par Israël qui a éclairé le camp à travers les bombes et les fusées éclairantes. » Il dit que « c’est jusqu’au lendemain matin qu’ils ont appris qu’il y ait des tueries et des abattages, malgré qu’ils voyaient passer des gens blessés. » Cependant, les tireurs d’élites répartis sur l’ensemble du camp et l’utilisation des silencieux empêchaient les habitants de sortir et voir ce qui se passait à l’extérieur de leurs habitats ; ce qui a permis aux miliciens de commettre leur crime tranquillement et tuer un nombre plus grand.

Sabra-Chatila : Des souvenirs qui ne sèchent pasMohamed Srour se souvient du moment où il a  entendu un homme conseillant son cousin de ne pas revenir au camp, car toute la famille Srour vient d’être massacrée ; ce monsieur, selon Mohamed, parlait « sans savoir qu’il s’agissait de sa famille.» « J’ai couru vers le camp mais mon frère et d’autres hommes m’ont empêché. »

La famille Srour était, selon son fils Mohamed, toujours en vie lorsque l’une de leurs voisines qui dormait chez eux a pris son petit frère Nidal au toit de la maison afin de voir ce qui se passait, cela a coïncidé avec le passage d’une patrouille, les soldats ont commencé à crier en disant « êtes-vous toujours vivants ? Ouvrez-nous la porte ! » Il continue son histoire en disant : « Mon père a ouvert la porte, il leur a  proposé l’argent qu’ils ont pris, mis de côté, et ensuite ils ont commencé à tirer ; ma mère n’était pas morte, l’une de mes sœurs (âgée d’un an) s’est faite tirée dessus lorsqu’elle essayait de joindre sa mère. Son cerveau est sorti de sa tête pour se retrouver sur ma mère.» Mohamed dit : « mon frère a réussi à survivre parce qu’il s’est caché aux toilettes pendant que ma sœur Soad est devenue paralysée. »


Sabra-Chatila : Des souvenirs qui ne sèchent pasLorsque nous disons à Mohamed que Ariel Sharon a nié sa participation à cette massacre, il nous répond en disant que «  les habitants du camp ont vu Sharon pas loin du camp lors du massacre, c’est lui qui encerclait le camp et c’est lui qui a permis aux militants des Forces Libanaises de commettre leur crime en leur facilitant la tâche à travers l’éclairage de la région. »





« Je ne peux oublier ce que j’ai vu lorsque je me suis retourné au camp ; les cadavres dispersées, les femmes avec les vêtements déchirés, et surtout cet homme qu’ils avaient tué et ensuite arraché la tête pour la mettre sur une canne ; cela m’a beaucoup touché, peut-être plus que ce qui s’est passé avec mes parents, il y avait aussi une femme qui allaitait son bébé lorsque tous les deux ont été tués. » dit-il.

Sabra-Chatila : Des souvenirs qui ne sèchent pasPlusieurs questions nous viennent en tête lorsque nous parlons de Sabra et Chatila et d’autres massacres commis par l’entité sioniste : Combien de personnes doivent être tuées pour que la société internationale puisse considérer le crime comme un massacre ou un crime de guerre ? Comment le monde a-t-il pu accepter que le criminel de Sabra et Chatila puisse devenir un premier ministre et tourner le monde entier sans craindre le jugement ? Quelle serait l’attitude des Nations-Unies et de la société internationale si un tel massacre avait été commis par une armée arabe contre les Israéliens ?

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