Etats-Unis, la ruée vers le passé !

Akil Cheikh Hussein
Dans le discours du président américain, Barak Obama, où il a promis le retrait de ses armées de la guerre en Afghanistan dans un délai situé entre cet été et la fin de 2014, il y a quelque chose qui va au-delà des polémiques qui ont éclaté à ce sujet parmi les militaires et les politiques américains dont les vues divergentes sont allées de l'approbation aux réserves pour des considérations en relation avec le choix du moment de ce retrait ou avec la précipitation dans la prise de décision à cet égard.
Il en est de même pour ce qui est de la polémique au sujet des informations parlant de négociations entamées par les Américains avec le mouvement Taliban, et ce après toutes les affirmations américaines refusant toute discussion avec les terroristes.
En effet, le discours du président a comporté une expression devant laquelle analystes et observateurs ne se sont point arrêtés bien qu'elle puisse avoir une connotation qu'on peut qualifier d'extrêmement significative : "Il est temps maintenant de se focaliser sur la construction de la nation, ici, à l'intérieur".
Voulait-il dire ce qui a été compris par les analystes et les observateurs qui ont considéré que, dans le contexte de la campagne des élections présidentielles, cette expression est une manière d'amadouer la rue américaine en lui donnant l'impression que l'attention du président sera axée lors de l'étape à venir non pas sur la guerre en Afghanistan, mais plutôt sur la difficile situation économique qui augmente en gravité aux Etats-Unis ?
Cela est possible. Mais il est aussi possible que, de plus, Obama voulait amadouer cette rue pour une toute autre raison : Les Américains ont souvent présenté le syndrome de la nostalgie du passé des Etats-Unis, et notamment de la période des quarante ans qui ont débuté avec la fin de la guerre civile entre le nord et le sud pour se terminer avec le début de l'implication américaines dans les problèmes du "Vieux monde", vers la fin de la première guerre mondiale.
Cette période avait connu une expansion géographique des Etats-Unis depuis le golfe du Mexique jusqu'aux frontières de ce qui est devenu maintenant le Canada et au-delà de leurs frontières jusqu'en Alaska à l'extrême nord polaire, et des côtes de l'Atlantique, à l'est, jusqu'aux côtes du Pacifique à l'ouest avant d'atteindre les îles d'Hawaii.
Parallèlement à l'expansion géographique, les Etats-Unis ont réalisé de grands sauts au niveau du progrès économique et cela a fait d'eux un synonyme -même pour les Européens- de la prospérité, de la richesse et du bien-être.
L'implication des Etats-Unis dans les problèmes du monde extérieur leur a permis de multiplier leur potentiel économique en même temps que leur puissance militaire grâce à laquelle ils ont pu sortir victorieux de la première et de la deuxième guerre mondiale. Et c'est ainsi qu'ils se sont imposés comme grande puissance lors de la guerre froide avant de devenir, avec l'effondrement de leur adversaire soviétique, la puissance mondiale unique.
Tout cela, et en dépit de toutes les guerres "aisées" et "juteuses" menées par les Etats-Unis loin de leurs frontières, ne s'est pas passé sans mettre les Américains aux prises avec d'innombrables problèmes : Des dépenses militaire exorbitantes, de lourdes pertes humaines, l'angoisse née de l'éventualité d'une guerre nucléaire lors de la guerre froide, l'accroissement du malaise intérieur liée à l'image de "l'Américain hideux" qu'a concrétisée la guerre du Vietnam et, avant elle, les bombes atomiques américaines lancées contre le Japon.
Il est possible de dire que cette nostalgie du passé isolationniste se renforçait conjointement aux souffrances subies par les Etats-Unis comme prix indétournable de leur politique interventionniste et impérialiste, et qu'elle a atteint son paroxysme et pris une forme proche de la fuite vers le passé au stade actuelle, c'est-à-dire celui qui a été inauguré par les attentats du 11 septembre 2001.
Ces attentats avaient fourni aux Etats-Unis une précieuse occasion pour accomplir leur projet le plus cher représenté par la création de l'empire américain mondiale. Ils ont en effet commercialisé grâce à ces attentats une "légitimité" qui leur a permis de lancer plusieurs guerres dites "justes" auxquelles ont participé des dizaines d'autres Etats dans le but de mettre la main sur une région stratégique qui est la plus sensible sur le plan mondial.
Il est vraiment tragique pour les Américains qui ont cru, pour un moment, que le monde est tombé dans leurs mains comme un fruit mûr, de se rendre compte, malgré l'écrasante suprématie de la machine guerrière, et malgré leur imposante présence et leur influence qui leur ont tant permis de réaliser des gains et de remporter des victoire sans même passer par la guerre… Il leur est vraiment tragique de se retrouver au milieu d'une foule de constats comme l'impuissance de remporter ne serait-ce qu'un semblant de victoire contre deux faibles pays comme l'Afghanistan et l'Iraq, comme la ruine de la légende de l'invincibilité de l'armée israélienne par la main de la résistance au Liban et à Gaza, comme l'écroulement comme des châteaux de sables de leurs protégés parmi les régimes arabes, comme l'inefficacité de leurs pressions et sanctions à empêcher, l'Iran, la Syrie et les pays d'Amérique latine de prendre la route de la libération, ou comme le retour avec force de la Russie, de la Chine et d'autres pays pour prendre une place avancée sur la scène mondiale et pour revendiquer un monde multipolaire sur les ruines du pôle unique américain…
Il suffit que de grands stratèges américains comme zbigniew Brzezinski reconnaissent maintenant le "grand recul" du rôle des Etats-Unis dans le monde, et que d'innombrables analystes et observateurs multiplient des prédications sur l'imminent effondrement des Etats-Unis, à un moment où, s'affaissant sous le poids de leurs crises économique, sociale et politique, il ne font pas cesse de rouspéter contre leurs alliés européens, ou de s'engager dans des polémiques de plus en plus fréquentes à l'intérieur de leurs institutions dirigeantes, de la Maison blanche au services de renseignement, en passant par le Congrès et le Pentagone.
Lorsque le président américain dit qu'il est temps de se focaliser sur la construction intérieure de la nation américaine, il ne fait que reconnaître à haute voie que la "ruine" prend toute son ampleur aux Etats-Unis, et que les Etats-Unis ont raison de se sentir appelés à s'enfuir vers le passé !
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