Sayed Nasrallah aux moudjahidines: Soyez prêts à libérer le Jalil si une guerre est imposée sur le Liban
Discours du secrétaire général à l’occasion de la commémoration des leaders martyrs de la résistance (16 février 2011)
Je voudrais pour commencer saluer les familles des martyrs, celle de notre chef, notre maître et notre leader sayed Abbas Moussawi, celle de la moujihda martyrs « Oum Yasser » Moussawi et leur fils martyr Hussein, celle de notre cheikh martyr Ragheb Harb et celle du grand chef jihadiste, faiseur de victoires hajj Imad Moghnié, hajj Radouane.
Plusieurs autres occasions se mêlent à l’occasion principale qui nous pousse à nous rencontrer et nous devons les évoquer avant d’entrer dans le vif du sujet. Il s’agit d’abord de la naissance du Prophète. Vous savez qu’il y a deux avis sur la question, certains disent qu’Il est né le 12 et d’autres le 17. L’imam Khomeiny qui a toujours prôné l’unité islamique a suggéré de faire de la semaine allant du 12 au 17 celle l’unité, du rapprochement et de la cohésion entre toutes les factions musulmanes dans toutes leurs diversités.
Une autre occasion qu’il faut commémorer, celle de la victoire de la révolution islamique en Iran le 11 février 1979, en même temps que la victoire du peuple égyptien et des ses jeunes sur leur despote. C’est une coïncidence bénie qui fait que les deux plus importants régimes alliés des Etats-Unis et d’Israël soient tombés le 11 février, celui du Shah d’Iran et celui de Hosni Moubarak en Egypte.
Une autre occasion importante, l’assassinat du Premier ministre martyr Rafic Hariri, le 14 février 2005, cet événement sanglant qui a eu des répercussions graves sur la scène libanaise et régionale et dont nous continuons à subir les effets.
Aujourd’hui, nous nous rencontrons pour commémorer le souvenir de nos chefs martyrs. Lorsque nous le faisons, ce n’est pour les louer, car ils n’en ont pas besoin, mais pour nous, pour tirer les leçons de leur parcours et nous inspirer de leurs actions et surtout pour renouveler le serment et l’engagement de poursuivre la lutte dans le sillon qu’ils ont tracé.
L’an dernier, j’avais évoqué certains points communs entre ces trois chefs. Aujourd’hui, je voudrais en ajouter un : ils ont été ceux qui ont posé les premières pierres de cette résistance, les premiers cris et les premières balles. Un autre point commun entre eux est le fait qu’ils n’ont jamais faibli, n’ont jamais été fatigués ou désespéré de la résistance. Au contraire, ils ont, du début jusqu’à la fin, été présents aux commandes de la résistance à laquelle ils ont dédié leurs vies.
Ces chefs expriment avec précision les trente années de la l’histoire de notre résistance. Dans un an, celle-ci aura exactement trente ans. Chacun d’eux représente une étape de cette histoire et leur sang se complète pour donner plus de détermination, d’éveil, de confiance et d’amour dans la résistance. Nous autres, nous considérons que nos chefs martyrs comme partie intégrante des développements au Liban et dans la région. Nous faisons partie d’eux et nous sommes la continuité des chefs fondateurs à leur tête l’imam disparu Moussa Sadr, des chefs de la résistance libanaise et d’autres de la résistance palestinienne. Nous sommes fiers de faire partie du mouvement d’éveil et de résistance dans la région, qui sont la réponse des peuples à l’invasion, à l’occupation et aux projets d’hégémonie.
Ces mouvements de résistance et les peuples de la région n’ont attaqué personne et n’ont pas commencé des guerres. D’ailleurs, leur programme n’a jamais été un projet de guerre. Ils ont été agressés, leurs terres et leurs croyances ont été occupés et bafoués. Mais en réalité, ces mouvements et ces peuples sont la garantie de la réalisation de la justice, de la stabilité et de la paix.
Permettez-moi aujourd’hui de parler de justice et de stabilité, puisque c’est ce qui attend le Liban au cours des prochaines semaines sous le titre de la nouvelle invasion américaine, après l’échec de l’invasion militaire. J’évoquerai ensuite ce qui se passe dans la région et le dossier israélien.
Nous sommes convaincus que la stabilité au Liban et dans la région repose sur la justice. La paix et la stabilité basées sur l’injustice, l’oppression et la violation des droits et de la dignité ne peuvent se prolonger et s’effondreront tôt ou tard. C’est sur cette base que nous fondons notre vision et notre lutte.
Revenons un peu aux sources et aux origines du problème depuis 60 ans, puisque le retour aux sources est actuellement à la mode.
Ce problème a deux aspects. Le premier consiste dans la présence de l’entité qui a violé la Palestine, à savoir Israël. Le mouvement sioniste a commencé la guerre. Ce ne sont ni les Palestiniens, ni les Jordaniens, ni les Syriens ni les Egyptiens, ni les Libanais qui ont attaqué les Juifs et les sionistes. Si nous revenons aux siècles derniers, les juifs ont toujours vécu en paix et en sécurité dans les terres d’islam, souvent bien plus que les musulmans eux-mêmes qui avaient souvent des problèmes avec leurs sultans ou leurs dirigeants.
Ce sont donc eux qui sont venus en Palestine et dans la région, ont attaqué, détruit, tué et chassé le peuple de ses biens. Ils ont mené les guerres d’occupation puis d’expansion, avec un appui total de l’Occident –je ne veux pas évoquer ici la position arabe en 1948-. Les mouvements de résistance en Palestine et dans la région sont nés en réaction nationale, morale et noble à cette agression. C’est pourquoi, nous disons la logique de la résistance et celle de la justice sont une condition essentielle de la stabilité. En quoi consiste cette justice ? Je m’adresse ici à M.Obama et à Mrs Clinton qui parlent aujourd’hui de justice et de stabilité.
La justice a désormais deux faces : la première consiste à rendre le droit à ses propriétaires. Autrement dit, la terre, les biens, les maisons et les champs doivent revenir à leurs propriétaires qui d’ailleurs en ont conservé les clés et rêvent du retour. La justice consiste à ramener les millions de réfugiés palestiniens et à redonner les Lieux saints chrétiens et musulmans à leurs propriétaires, mais aussi à donner au peuple palestinien le droit de créer son Etat indépendant du fleuve à la mer. La seconde face de la justice est de juger les criminels contre l’humanité. A l’ombre d’une telle justice, il y aura une stabilité, une paix et une sécurité inégalées dans la région. Mais chercher la paix et la justice à travers des négociations vaines, alors qu’en parallèle, les criminels sont récompensés ne peut être efficace. Où est l’administration américaine dans la recherche de la paix et de la justice dans la région ? Où est cette administration et avec elle les gouvernements occidentaux dans la volonté de redonner les droits à leurs propriétaires et de la poursuite des criminels sionistes, qui, au contraire, bénéficient d’une protection renforcée, au point que des gouvernements sont en train d’amender leurs lois pour éviter de recevoir des plaintes contre tel ou tel général israélien accusé de crimes de guerre ?
Le second aspect du problème de la région est le système américain et occidental basé sur des régimes dictatoriaux qui gouvernement leurs peuples par le fer et le feu, appuyés par des élites politiques, médiatiques et religieuses. La mission principale de ces régimes est de protéger les intérêts américains et occidentaux, économiques à cause du pétrole, mais aussi politiques et sécuritaires avec à leur tête la sécurité d’Israël. Israël est donc le critère de l’appréciation et de l’appui occidental à un régime dans la région. Plus il l’appuie et sert ses intérêts et plus il est appuyé par l’Occident. Le critère de l’appui américain n’est donc pas le respect des droits de l’homme, ni la démocratie, ni les libertés, mais les services rendus à Israël. Dans ce cas, il jouira de l’appui nécessaire, obtiendra des aides financières et il aura toute latitude pour faire ce qu’il veut à son peuple. Par contre, si un régime arabe rejette les conditions qui lui sont imposées, sans pour autant se battre contre Israël, simplement, il n’accepte pas de faire tout ce qu’on lui demande, alors il fait l’objet de sanctions, de complots et de tentatives de le renverser. N’est-ce pas ce qui se passe dans la région depuis des décennies ?
Je me souviens qu’au moment de l’émergence de l’imam Khomeiny, au début des années soixante, il y a eu des manifestations à la suite de certains de ses discours. Une délégation de la Savak, le service de renseignements du shah mené par les Américains, était venue le voir pour lui transmettre le message suivant : « Parlez autant que vous voulez, nous ne vous l’interdirons pas. Mais il y a des lignes rouges auxquelles vous ne devez pas toucher : d’abord les Etats-Unis, ensuite Israël, puis la personne du Shah. Quant aux autres, le Premier ministre, les ministres, les députés, les fonctionnaires, vous pouvez les insulter autant que vous voulez. En Ira, ceux qui tenaient le pouvoir étaient les Américains et le shah n’était qu’une façade. Il s’agissait d’un régime israélien et non pas seulement allié à Israël. Mais l’imam avec courage et sincérité s’est adressé au peuple et lui a expliqué que la révolution avait pour objectif de chasser ce régime américain et israélien. Il a été arrêté et a failli être pendu. Cet exemple montre bien que le critère pour les Etats-Unis des régimes amis et alliés est leur attitude par rapport à Israël.
Pour conclure ce volet, je voudrais dire que cet Israël surprotégé et arrogant et le système américain dans la région ont poussé les peuples de la région au désespoir. Les gens ont senti au début des années soixante dix qu’ils étaient entrés dans une période israélo-américaine dans la région et qu’ils ne pouvaient rien y changer.
Le premier coup porté à toute volonté de résistance arabe a été la signature des accords de Camp David par le régime égyptien, qui s’est ainsi dégagé du conflit arabo-israélien. Mais peu de temps après ce coup, il y a eu le plus grand séisme dans la région qui consiste dans la victoire de la révolution islamique en Iran le 11 février 1979. Ce pays a coupé les liens avec Israël et les Etats-Unis et il est devenu une base d’appui au projet de résistance dans la région. Cet événement a constitué une transformation stratégique dans la région à laquelle les Etats-Unis et l’Occident a répondu par les sanctions et l’isolement.
La confrontation s’est prolongée au cours des 30 dernières années. La Syrie et le peuple palestinien ont tenu bon, dans des circonstances très difficiles. Il y a eu ensuite la résistance au Liban qui a enregistré des victoires, puis les changements survenus au cours de la dernière décennie en Irak et en Afghanistan. Enfin ces dernières semaines, il y a eu les changements en Tunisie, les soulèvements dans plusieurs pays arabes mais le plus grand événement est la chute du régime de Hosni Moubarak en Egypte le 11 février 2011.
Ce qui s’est passé en Egypte est historique. Nous devons rendre hommage au peuple égyptien et le Hezbollah lui rend un hommage particulier puisqu’il a libéré l’otage du régime Mohammed Mansour qui est présent parmi nous. En le voyant, je voudrais que vous vous rappeliez les charges retenues contre lui : comploter pour faire chuter le régime, déstabiliser le pays et « chiiiser » l’Egypte ! Ce sont naturellement des accusations stupides et nous avons déjà parlé de cette question au sujet de ce qu’on a appelé « la cellule du Hezbollah ».
Les événements d’Egypte ont soulevé de nombreuses questions. Le nouveau régime annulera-t-il les accords de Camp David ? Nous aurons le temps de revenir sur ces questions. Pour l’instant, je dirais que l’après Hosni Moubarak ne sera pas comme la période qui l’a précédée. La principale conséquence sera sur Israël. Pour conclure ce volet, j’ajouterais que le système américain dans la région commence à s’effondrer. Il faudrait garder cela en tête en parlant du Liban, où le problème n’est pas seulement la lutte entre le 14 et le 8 mars. Il s’inscrit aussi dans le grand projet américain dans la région…
La première conséquence du changement en Egypte est donc sur Israël et sur l’ensemble du système américain dans la région, dont le Liban. Car Hosni Moubarak a laissé des orphelins en Egypte, en Palestine et au Liban. Ce qui est sûr, c’est que la région entame une nouvelle phase. Le Premier ministre de l’ennemi Netanyahu parle « d’un séisme dont nul connaît encore les résultats ». Il a raison. Ce qui s’est passé a surpris les services de renseignements américains et israéliens. Le grand perdant des événements dans la région est certainement l’Amérique qui cherche à limiter les pertes et à contenir les changements. Brefs, les perdants sont les Etats-Unis, Israël et tous ceux qui lient leur sort à celui des Américains.
Il est clair qu’au sein de l’entité israélienne, un vent de panique souffle actuellement. Il y a des tentatives de revoir les stratégies en vigueur depuis vingt ans. Depuis les accords de Camp David, la stratégie israélienne a été basée sur le fait que la frontière sud (avec l’Egypte) est sûre et que le régime égyptien allié est solide. Par conséquent, il était inutile de prévoir des unités combattantes chargées du front sud. D’ailleurs, au cours des dernières années, de nombreuses installations israéliennes ont été déplacées du Nord vers le centre ou le Sud, sous prétexte qu’il s’agit de zones sûres, éloignées du front avec la Syrie et le Liban. Aujourd’hui, ils doivent revoir cette donnée.
Par ailleurs, leur pari sur le régime égyptien est grand dans l’encerclement de Gaza et le contrôle de ce territoire, ainsi que sur l’exercice de pressions sur le camp palestinien pour qu’il accepte les conditions israéliennes. Nous entendions les responsables palestiniens évoquer les pressions exercées sur eux par des représentants du régime égyptien. Nous nous souvenons aussi de la position de ce régime lors de la guerre de Gaza en 2008, de son rôle pendant la guerre de 2006. Nous n’en avions pas beaucoup parlé car nous ne voulions susciter des problèmes. Les Israéliens ont raconté que Hosni Moubarak les avait contactés pendant cette guerre pour leur dire : continuez le travail. Vous êtes arrivés à la moitié du chemin, ne reculez pas. Parmi les visages qui se sont allongés lors de la victoire de la résistance en 2006, il y avait celui de Hosni Moubarak. D’autres régimes avaient aussi la même position et ils s’effondreront si Dieu le veut.
Même si l’Egypte ne combat pas Israël, le changement est énorme pour cette entité et il constitue une source d’angoisse. Je voudrais rapporter deux déclarations israéliennes pour confirmer ce sujet. Ehud Barak, le ministre de la guerre a déclaré : « La région est en train de changer sous nos yeux. Nous avons vy ce qui s’est passé au Liban, où le gouvernement est inquiétant pour diverses raisons (qu’est-ce qu’il veut dire ?), il est en tout cas plus lié au Hezbollah. Et nous voyons ce qui se passe en Tunisie et en Egypte ». Barak tient en quelque sorte les mêmes propos que certains à l’intérieur qui accusent le prochain gouvernement d’être celui du Hezbollah. Ce qui n’est pas le cas. Barak a ajouté : « Je ne crois pas que le changement en Egypte aura des conséquences immédiates. L’accord de paix avec l’Egypte sera maintenu ( là, il se veut rassurant), mais les changements montrent que la région est instable (Il y a vingt ans, Israël se sentait en sécurité et voulait contraindre les pays arabes à signer des accords selon ses conditions). La Turquie est en train de changer… »
L’ancien chef d’Etat major Ashkénazi déclare de son côté : « le camp radical est en train de grandir. Le champ d’affrontement s’élargit mais nous sommes prêts à affronter tous les types de menaces. Le camp radical se sent fort. Les indices sont nombreux, avant l’Egypte au Liban et en Turquie. L’Iran est derrière le financement, l’équipement et l’entraînement des mouvements terroristes dans le monde et pas seulement dans la région. Les raisons de ce renforcement est la faiblesse du camp modéré (ce fameux système que j’ai évoqué au début) et des gouvernements arabes traditionnels, ainsi que la force américaine dans la région ». C’est la réalité en Israël aujourd’hui.
Sur le thème libanais, je voudrais rappeler qu’il y a quelques jours, une cérémonie était organisée en hommage au chef d’Etat major israélien sortant Gaby Ashkénazi et à ses réalisations au sein de l’armée après les échecs au Liban et à Gaza (alors qu’auparavant, la guerre de Gaza était qualifiée de victoire en Israël. Il y a donc une angoisse et des débats réels chez l’ennemi. De véritables questions sont posées sur la possibilité pour la résistance d’entrer dans le nord de la Palestine et de libérer la Galilée ? C’est pourquoi le chef d’Etat major est contraint de rassurer les citoyens. Sinon, il n’aurait pas eu besoin de le faire.
Le nouveau chef d’Etat major Béni Gantz a effectué sa première tournée, au lendemain de sa nomination, à la frontière avec le Liban, en compagnie de Barak pour montrer sa force. Barak qui est un spécialiste (notamment lorsqu’il avait évoqué les 5 brigades prêtes à entrer au Liban) a déclaré aux soldats : vous devez vous tenir prêts, car s’il y a une nouvelle guerre, votre commandement pourrait vous demander d’envahir de nouveau le Liban. Je voudrais dire à Barak et à Gantz, en utilisant les mêmes formulations : à l’occasion de la commémoration de nos leaders martyrs, je dis aux moujahidins : vous devez vous tenir prêts car si une nouvelle guerre est imposée au Liban, le commandement de la résistance pourrait vous demander de contrôler la Galilée, en d’autres termes de le libérer. Je dis aussi à Ashkénazi : vous vous trompez dans votre évaluation de la situation, comme vous l’avez fait depuis trente ans, en tuant cheikh Ragheb Harb, puis sayed Abbas Moussawi. Vous avez reconnu avoir commis des erreurs d’évaluation après ces deux meurtres et vous découvrirez prochainement l’erreur commise en tuant hajj Imad. Tout comme vous avez fait une erreur en voulant à tout prix affronter un pays et un peuple déterminés à protéger leur dignité en offrant le sang de leurs meilleurs jeunes, un peuple qui a pour slogan depuis des siècles : « Nous n’acceptons pas l’humiliation ».
Il existe chez l’ennemi des gens réalistes qui ne se cachent pas derrière leur petit doigt. L’an dernier, à cette même occasion, j’avais parlé de ports et d’aéroports. Les frères m’ont rapporté aujourd’hui que le premier directeur du projet Houma contre les missiles au ministère de la Défense israélien, un expert qui connaît les missiles, leur portée et leurs tactiques a déclaré : Le Hezbollah est en mesure de fermer notre aéroport, nos ports, nos centres d’énergie et d’autres points stratégiques. Je souhaite simplement que le peuple israélien possède d’autres abris ». L’homme qui dit cela sait de quoi il parle.
Sur un autre plan qui concerne le sang du martyr Imad, je voudrais dire que ce sang continue à poursuivre les responsables israéliens à l’intérieur de l’entité ou en dehors d’elle. Je ne voudrais pas donner de détails, mais sachez que la décision reste la même et elle sera exécutée au moment voulu avec la cible voulue. Je dis simplement aux dirigeants israéliens : « Où que vous soyez dans le monde et à n’importe quel moment, vous devez mettre vos têtes à l’abri car le sang de Imad Moghnié vous poursuivra ».
Au Liban, nous avons réussi dans une grande mesure à réaliser la justice et la stabilité dans notre confrontation avec Israël. Les mouvements de résistance, les forces et les partis libanais avec certains moujahdins et martyrs palestiniens ont réussi à rendre leurs droits à ceux qui en ont été spoliés :les habitants de Bint Jbeil, de Jezzine, de Marjeyoun et de Hasbaya sont rentrés chez eux et ont retrouvé leurs biens, alors que le territoire est revenu sous la souveraineté nationale. Cette justice a été réalisée par les Libanais et leurs alliés palestiniens, syriens et iraniens, non par le Conseil de sécurité, les Etats-Unis ou la communauté internationale.
L’autre aspect de la justice, la poursuite et le jugement des criminels, a été souvent réalisé sur le terrain. Le commandant des troupes israéliennes au Liban, Gerstein a été tué au cours des affrontements. C’est d’ailleurs le même Béni Gantz qui lui a succédé. Le nouveau chef d’Etat major a passé les deux dernières années de l’occupation au Liban et couvrait l’ALS d’Antoine Lahad. C’est donc lui qui a retiré ses troupes du Liban et qui a fermé la porte entre le Liban et la Palestine occupée, de cette façon humiliante. Il connaît donc parfaitement la signification du Liban et de son sud et il est un des chefs de la défaite israélienne de juillet 2006…
Du 25 mai 2000 à juillet 2006, le Sud et la Békaa ouest ont bénéficié d’une situation de stabilité qu’ils n’avaient plus connue depuis 60 ans, grâce à la présence de la résistance. La guerre de juillet était un projet particulier qui s’inscrivait dans le cadre d’un projet global pour la région, qui a échoué. Depuis la fin de cette guerre, le 15 août 2006 jusqu’à aujourd’hui, l’armée, la résistance et le peuple forgent la décision. C’est donc la résistance, en coordination avec l’armée et le peuple, qui assure la stabilité et la justice. Elle défend ses frontières, non celles de l’ennemi. Après toutes les expériences passées, c’est cette équation qui protège le Liban.
Je vais passer maintenant au volet interne libanais, où des échéances importantes nous attendent alors que des sujets bien connus reviennent au premier plan.
Au sujet des armes de la résistance, nous avons entendu dans les discours de ce qui reste du 14 mars la volonté de revenir à cette vieille rengaine. D’ailleurs, ce camp ne l’a jamais vraiment abandonnée, même après son inscription dans la déclaration ministérielle. Il a été dit que ce sujet ne fait pas l’unanimité au Liban. C’est vrai, nous n’avons jamais prétendu le contraire. Il a toujours constitué un thème de conflit, avant 1982 et après. La résistance a été critiquée, combattue, frappée dans le dos. C’est une honte pour eux, non pour la résistance, notamment pour ceux au sein du 14 mars qui ont travaillé dans le sens de l’accord du 17 mai, voulant même détailler la quantité d’armes que l’armée est autorisée à introduire au Sud, un peu comme dans le cadre de l’accord de camp David. Aujourd’hui, nous avons entendu une nouvelle qui nous a attristés : Israël a autorisé le déploiement d’un surplus de forces militaires égyptiennes au Sinaï, pour protéger les canaux qui transportent le gaz égyptien vers Israël. Autrement dit, l’armée égyptienne qui a donné des martyrs dans la guerre contre Israël a besoin de l’autorisation de celui-ci pour déployer ses troupes sur son sol. C’est aussi ce qui était prévu dans le cadre de l’accord du 17 mais pour l’armée libanaise auquel travaillait une partie de l’élite relevant du 14 mars. Grâce à la résistance, l’armée peut aujourd’hui rassembler 50000 hommes et les envoyer au Sud à la demande de son gouvernement, sans tenir compte des réactions israéliennes. La liberté dont nous jouissons désormais au Sud est totale. Elle est digne et responsable car elle n’est pas le fruit de compromis, de négociations humiliantes ou de reddition.
Oui, nous sommes en conflit au sujet des armes de la résistance et si certaines parties au cours des dernières années nous mentaient, aujourd’hui, elles ont choisis de ne plus le faire. Parfait. Nous leur en sommes reconnaissants. Que chacun dise désormais ce qu’il a sur le cœur et annonce sa véritable position.
Dans le passé, nous avons accepté de participer à la conférence du dialogue pour discuter d’une stratégie de défense. Mais si votre position était déjà tranchée au sujet de la résistance, vous auriez dû nous dire que cette conférence était inutile. Nous autres, nous pensions que le fait pour nous d’accepter cette conférence était une grande concession de notre part, en faveur du pays et l’expression de notre attachement au dialogue et de notre ouverture. Aujourd’hui, cette question a été apparemment tranchée, alors pour éviter de fatiguer inutilement le président de la République, dites-lui clairement que vous ne voulez plus de cette conférence. Par contre, si certains veulent un dialogue véritable, nous sommes prêts, car nous sommes des gens rationnels et nous croyons à la logique et à la stratégie et nous l’avons prouvé au cours des dernières années.
Si vous croyez que les discours quotidiens touchent la résistance, vous vous trompez et vous vous fatiguez pour rien, comme vous l’avez fait au cours des dernières années. La situation tout entière a changé. J’invite les jeunes à suivre de près ce qui se passe dans la région. Tout le monde doit le faire. Insister pour faire des armes de la résistance un des trois titres de la bataille menée par la nouvelle opposition est une erreur car il s’agit d’une bataille perdue d’avance. Que ceux qui veulent malgré tout la mener le fassent seuls, sans entraîner avec eux d’autres.
Le second titre de la bataille est le TSL. Je le répète une fois de plus : nous voulons tous au Liban la vérité et la justice et nous sommes convaincus qu’elles sont à la base de la stabilité. Mais je voudrais demander calmement aux dirigeants et au public du 14 mars : est-ce que le processus adopté par l’enquête internationale et par le TSL indiquent réellement le désir de connaître la vérité ? Mène-t-il à la justice ? Nous avons vu le dossier des faux témoins. Nous avons entendu comment étaient menée l’enquête et comment toutes les questions étaient politiques et les réponses basées sur des analyses, des opinions personnelles et des on-dits. Est-ce que ce genre d’éléments est généralement pris en compte en matière judiciaire ? Le dossier des faux témoins, les fuites, la politisation, l’exploitation de certaines hypothèses, le jugement avant le procès pou même l’enquête sont-ils des moyens qui mènent vers la vérité et la justice ? Nous sommes concernés en tant que Libanais par l’ensemble de cette question et nous devons la discuter. Nous devons aussi nous demander s’il existe une autre voie pour la vérité. Si nous discutons ensemble, nous pouvons parvenir à des résultats. Mais vous avez perdu cette occasion. A la table du dialogue qui était alors présidée par le frère Nabih Berry nous avons évoqué cette question et nous avons accepté le principe du TSL. Nous l’avons par égard au climat général d’alors et pour resserrer les rangs internes. Nous n’avons jamais été convaincus de l’intégrité du TSL. Nous avons accepté le principe en disant clairement : nous voulons discuter les statuts de ce tribunal ainsi que les lois qui y seront appliquées. Nous voulions des garanties pour la justice et la vérité. Mais tous les Libanais savent comment les statuts ont été adoptés à la va-vite sans être discutés. Ce qui signifie que depuis le début, il était décidé que le TSL prendrait une orientation précise, politisée et que nul n’aurait le droit de la discuter ou de la modifier.
Aujourd’hui, vous voulez continuer avec ce TSL qui ne veut creuser qu’une seule piste, alourdi par le dossier des faux témoins, par les fuites, la politisation et la corruption. Vous êtes libres de le faire. Si vous pensez que ce que fait ce TSL ainsi que le contenu de l’acte d’accusation et les jugements par défaut mènent vers la vérité, agissez en conséquence. Quant à nous, nous agirons sur la base de ce que nous avons être de la falsification et de l’injustice et nous savons que ce processus ne mène nullement vers la vérité et la justice.
Le troisième titre de la bataille est la situation gouvernementale.
Ce qui est arrivé à l’autre camp est le fruit de ses propres erreurs. Malheureusement, dans son analyse de ce qui lui est arrivé, ce camp se trompe dans la définition de ses erreurs. Ce qui lui est arrivé est le résultat de ses propres erreurs, mais aussi une conséquence du coup porté au grand projet régional, dont ils sont partie prenante.
Avec les néo-conservateurs, leur ami Bolton et l’administration de George Bush en général, il y avait un grand projet dans la région, d’Afghanistan à Gaza, en passant par l’Irak, la Syrie et le Liban. Il y avait un projet d’hégémonie sur l’ensemble de cette région et ils faisaient partie de ce plan. Ce n’est pas une accusation, mais une réalité. Nul n’ignore leurs liens avec Bolton, Feltman et l’administration américaine précédente et actuelle. Nul n’ignore aussi leurs liens avec le système américain dans la région, dont notamment le président égyptien déchu. Avec la chute d’une partie de ce système, l’autre est forcément ébranlée. Ne soyez pas surpris. Si on veut analyser une situation, il faut le faire en la prenant dans sa totalité. Je vous invite donc à une lecture réaliste de ce qui se passe dans la région et vous découvrirez les véritables erreurs que vous avez commises.
Il faut revenir aux sources pour comprendre les erreurs commises. La première est d’être une partie du projet américain dans la région. C’est aussi la plus grande. La plus grave est de lier le sort du Liban à celui des politiques américaines dans la région. Enfin, la plus terrible est d’utiliser l’appui américain et celui du Conseil de sécurité pour s’imposer sur la scène interne. Hélas, ils sont en train de refaire les mêmes erreurs en cherchant à monter les Américains – Comme si ceux-ci en avaient besoin-, les arabes qui restent, les Français et la communauté internationale contre le Premier ministre Négib Mikati et son gouvernement qualifié de « gouvernement du Hezbollah, d’Iran et de Wilayet al Fakih ».
Depuis le début, la confrontation est basée sur le mensonge et l’injustice. Ils refont les mêmes erreurs. Aujourd’hui, je sens que ce camp est faible. Voulez-vous savoir pourquoi ? Parce qu’il ment, parce qu’il est injuste et se ment à lui-même avant de mentir à ses partisans. Ils savent que ce gouvernement n’est pas celui du Hezbollah. Ils discutent avec le Premier ministre Mikati, ils négocient avec lui et ils savent comme le savent les occidentaux et les Libanais que Mikati traite avec le Hezbollah comme avec toutes les autres composantes libanaises. Cet homme est maître de sa décision et il dit ce qui lui convient et ce qui ne lui convient pas.
En le dénigrant, c’est la présidence du Conseil qu’on dénigre. En l’accusant de former le gouvernement du Hezbollah, on nuit à la fonction de Premier ministre. Tout en sachant que si le Hezbollah formait le gouvernement, il l’aurait fait en 48 heures.
En d’autres termes, les moyens utilisés contre Mikati ne sont ni honnêtes, ni nobles, ni fondés sur des vérités. Est-ce servir l’intérêt national que de réclamer des pressions étrangères sur Mikati ? Pourquoi cherchez-vous à monter le monde contre le gouvernement Mikati ? A cause des armes ? Vous croyez pouvoir régler cette question en vous appuyant sur l’étranger Je vous ai déjà dit que vous perdez votre temps. Que fera de plus la communauté internationale, après avoir essayé la 1559 et la guerre de juillet ? Cherchent-ils ces pressions pour connaître le sort des 11 milliards de dollars disparus ? Pour amorcer des réformes ? Le gouvernement précédent a eu un an entier pour agir et il n’a rien fait. Aujourd’hui, ils ne veulent pas donner une seule journée au gouvernement de Mikati.
Le Premier ministre du gouvernement précédent a eu un an pour agir. Qu’a-t-il fait ? Il a été de pays en pays. Le Liban a besoin d’un gouvernement qui siège à Beyrouth, qui écoute les gens et suit leurs problèmes, un gouvernement qui appuie l’armée lorsqu’elle se bat contre l’ennemi à Adayssé au lieu de prendre l’air à l’étranger…Chaque Libanais aspire à un gouvernement sérieux, capable d’assumer ses responsabilités, qui écoute ses citoyens plutôt que les ambassadeurs… Ils vont dire maintenant, cette nouvelle majorité est virtuelle. Ok. Nous avons aussi dit cela d’eux au cours des dernières années, sans résultat. Pourtant, cette fois, nous sommes véritablement la majorité car nous avons aussi la majorité populaire, en plus de la majorité au Parlement.
Mais ce débat ne mène nulle part. Il y a un Premier ministre désigné et il formera un gouvernement. Ce qui se dit dans la presse au sujet des obstacles n’est pas vrai. Comme tout gouvernement au Liban, il sera divisé entre chrétiens et musulmans et réparti selon les confessions. Nous autres, nous n’avons rien à voir dans cela. Le retard pour l’instant est dû à l’attente de la réponse définitive de l’autre camp. Le Premier ministre cherche toujours à obtenir la participation de l’autre camp et nous autres nous sommes favorables à un gouvernement de participation nationale. Si certains veulent rester en dehors et attendre les flottes étrangères venues pour les sauver, ils sont libres de le faire. Mais le pays ne peut pas rester sans gouvernement. Lorsque la question de la participation sera tranchée, les blocs et les parties qui ont appuyé la désignation de Mikati devront accélérer le processus pour former au plus tôt un gouvernement sérieux, capable d’assumer ses responsabilités.
En conclusion, je voudrais revenir à l’exemple de courage, d’endurance, de détermination et de volonté donné par nos chefs martyrs et leur dire que leur sang nous a permis d’enregistrer des victoires et avec l’aide de Dieu et votre sacrifice, nous avons tourné la page des défaites pour ouvrir celle des victoires.
Traduction: Soraya Hélou
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