Sayyed Nasrallah propose un gouvernement de partenariat national sur le principe de non vainqueur ni vaincu
Discours du secrétaire général du Hezbollah à l’occasion du quarantième de l’imam Hussein
25 /1/2011
Traduction: Soraya Hélou
(…) Nous avons voulu cette année faire revivre le sens véritable de ce convoi qui, en réalité, a fait bouger l’Histoire. Il a été la voix du sang et nous nous tenons aujourd’hui commémorant le quarantième pour rendre hommage au cri de Zeinab et de Zeinelabidin dans ce lieu précis, la ville de Baalbeck, où ils ont prié, donnant ainsi à cette terre un caractère sacré ; Le convoi a laissé une partie de lui sur cette terre et c’est pourquoi nous avons voulu célébré cette commémoration en ces lieux.
A partir de maintenant, cette commémoration se tiendra chaque fois à Baalbeck. Nous devons travailler ensemble pour perpétuer cette mémoire et la faire évoluer. Cette région qui a accueilli le convoi est restée fidèle à son cri et à ses valeurs. Dieu a voulu que la résistance parte d’ici en 1982 contre le projet américano-israélien le plus dangereux, qui visait à changer l’identité du Liban pour le rattacher pour toujours au projet sioniste. La résistance islamiste est née ici, à Baalbeck et continue après des siècles à répondre à l’appel de Hussein.
Dans cette place chargée d’Histoire, nous avons en mémoire cette période où on avait dit qu’Israël a vaincu tout le monde et de nombreuses parties étaient atteintes de désespoir et d’un sentiment de défaite. Et soudain le maître de notre résistance, sayed Abbas Moussawi a retiré dans cette place même, ses vêtements d’homme de religion pour les troquer avec l’uniforme militaire. Il a pris le fusil et appelé les jeunes à participer aux camps d’entraînement et rejoindre la résistance. Baalbeck est depuis ce jour le foyer de la résistance et sa forteresse. Vous n’avez pas cessé de continuer sur la voie de Hussein, oubliant vos maisons détruites et vos enfants tués pour vous lancer dans la résistance sans la moindre hésitation. Vous êtes donc dignes de porter cette bannière.
En ce jour du révolté, du résistant et du combattant, ce jour du sang qui remporte une victoire sur l’épée, nous rendons hommage au peuple de Tunisie qui se révolte pour réclamer sa liberté, sa dignité et son droit. Il refuse de s’incliner devant le despote. La résistance au Liban adresse un grand hommage au peuple tunisien et l’invite à l’unité et à la cohésion pour empêcher toute partie de tenter de récupérer leur action si noble. Nous avons appris hier que Jeffrey Feltman que certains libanais appellent « l’ami Jef », s’est rendu à Tunis. C’est un indice pessimiste. Le peuple tunisien doit être conscient qu’il s’agit là d’un nouveau complot américain contre lui, sous couvert de préparer des élections démocratiques. Le peuple tunisien doit refuser les ingérences américaines, surtout celles de Feltman qui là où il se rend sème la discorde et les déchirements.
En ce jour des opprimés, nous devons aussi penser au peuple palestinien, encerclé à Gaza et persécuté en Cisjordanie, alors que des milliers de Palestiniens sont détenus dans les prisons. Le monde entier parle du prisonnier Chalit et oublie les milliers de Palestiniens opprimés et leurs droits. Nous nous souvenons des maisons détruites à Jérusalem est et dans les terres de 48. Nous pensons Jérusalem et aux constructions autour de la Mosquée al Aqsa, nous pensons aux millions de réfugiés dispersés dans le monde entier. Au sein de la résistance, nous avons dès le début cru en la Palestine et dans le peuple palestinien et dans la terrible injustice qui les frappe. Nous resterons aux côtés de ce peuple, nous souffrons avec lui, nous luttons avec lui et nous mourrons avec lui, et en fin de compte, nous ferons ensemble la victoire.
En ce jour de l’opprimé, nous condamnons les mains criminelles qui ne peuvent même pas supporter la liberté des pratiques religieuses ou celle de l’expression des opinions. Malgré les menaces et les forces du mal et de crime, des millions de personnes se sont rendues à Karbala pour confirmer leur fidélité et leur attachement à ses valeurs.
Concernant le Liban, nous vivons actuellement une période difficile et délicate qui exige un comportement responsable et des paroles responsables. Nous aspirons à une coopération entre toutes les parties pour surmonter cette étape sensible. Nous avons eu recours aux institutions constitutionnelles et aux choix juridiques pour faire face aux développements.
Pour affronter l’acte d’accusation qui vise la résistance, nous avons utilisé notre droit naturel et constitutionnel de démissionner du gouvernement, entraînant la chute de celui-ci. Il y a eu ensuite des consultations parlementaires qui ont abouti à un résultat clair. Et les chaînes de télévision viennent d’annoncer que le président deb la République a chargé le Premier ministre Négib Mikati de former le nouveau gouvernement.
Naturellement, nous comprenons la tension affective, nerveuse, politique et médiatique des dernières semaines. La bataille des consultations parlementaires était très intense. Je vous le dis : de nombreuses parties dans le monde y sont intervenues. Imaginez-vous que le vice-président américain Joe Biden a appelé un des chefs des blocs parlementaires pour lui demander en faveur du président Saad Hariri. D’autres interventions ont eu lieu. Malgré cela, nous disons qu’il s’agissait d’une bataille politique, qui a vu beaucoup de pressions, mais qui est restée dans le cadre légal et constitutionnel.
Nous avons abouti à ce résultat. Je le répète : je comprends le sentiment de colère. Mais je voudrais poser une question : si la situation était inversée et si le candidat adverse avait été nommé et que des gens de notre bord soient descendus dans la rue pour exprimer leur déception, comme l’ont fait les partisans de l’autre camp, aujourd’hui, toutes les personnalités à Washington et ailleurs auraient condamné cette action et multiplié les injonctions et les menaces. On les aurait accusés d’être des putschistes, des totalitaires qui refusent les règles démocratiques, des hors-la loi qui rejettent l’Etat et ses institutions. Par contre, lorsque les manifestants sont de l’autre bord- c’est-à-dire le sien- (je répète que je comprends leur réaction) le monde entier s’est tu, sans un mot pour le respect de la démocratie et des institutions. Une fois de plus, vous constatez que les critères ne sont pas les mêmes pour toutes les parties. Là aussi, il s’agit d’une majorité parlementaire. Pourquoi ne la respecte-t-on pas ? Si les manifestations et la coupure des routes sont des actes démocratiques, pourquoi avez-vous critiqué l’opposition ? Cela prouve une nouvelle fois qu’à l’administration américaine et dans beaucoup de pays du monde, il y a une politique de deux poids et deux mesures dictée par les intérêts. Toute l’attitude à l’égard des parties ne dépend pas des valeurs et des principes mais des intérêts en jeu.
Je crois qu’aujourd’hui, tous les discours dont on nous a abreuvés pendant 5 ou 6 ans sur la démocratie et le respect de la majorité sont tombés.
En tout état de cause, j’invite les Libanais à saisir la chance qui s’offre à eux. Les pressions sur le Premier ministre Négib Mikati ne servent à rien, tout comme les tentatives de fraude et de falsification des réalités. Je ne parle pas là des gens qui sont descendus dans la rue et qui sont sans doute sincères, mais de groupes de commandement qui savent qu’ils font et qui ont pris des engagements fermes que nous connaissons bien. Ces groupes, qui ont une longue expérience dans la fraude et la falsification, à commencer par le TSL et l’acte d’accusation, commencent à dire que le P M Négib Mikati est le candidat du Hezbollah. Il ne l’a jamais été et ne le sera pas. En 2009, il partageait une liste électorale avec eux et en général, c’est un homme du centre, qui n’est pas dans l’opposition ni dans le 8 mars. Prétendre qu’il est le candidat du Hezbollah vise à tenir un discours confessionnel et à réveiller ces sentiments.
La réalité est différente. L’opposition tendait à définir un autre choix et dans les dernières 48h, Négib Mikati a décidé de présenter sa candidature. L’opposition a vu dans cette candidature une chance de sortir du climat de défi, d’arrondir les angles et de traiter les problèmes en suspens. L’opposition ne voulait pas provoquer un affrontement décisif avec l’autre camp. Certes, elle avait émis des réserves sur la candidature d’une personne, mais elle ne voulait éliminer personne, ni former un gouvernement à coloration unique. Elle a donc vu dans la candidature de Mikati, une chance pour le pays et elle l’a appuyée. Ni le PM Mikati est membre du Hezbollah ni le gouvernement qu’il formera sera celui du Hezbollah. Ce n’est pas lui qui la dirige non plus. C’est là qu’intervient la fraude et la falsification adressée à l’étranger pour l’inciter à réagir au Liban. Je voudrais toutefois demander si les peuples arabes seraient malheureux de voir la résistance tenir le pouvoir au Liban ? Je ne le crois pas. Non, le but de ces campagnes médisantes est d’inciter les Etats-Unis, Israël et tous ceux qui sont inquiets pour leur projet au Liban à réagir. C’est la vérité c’est pourquoi je souhaite que ces campagnes s’arrêtent car plus nous entendons de tels mensonges et plus nous sommes convaincus de la justesse de nos choix, de nos droits et de notre vérité.
Je le répète, nous ne cherchons pas à prendre le pouvoir, ni le gouvernement. Jusqu’en 2005, nous n’avions participé à aucun gouvernement, en dépit des offres qui nous avaient été faites. L’année qui a précédé son assassinat, Rafic Hariri avait beaucoup insisté pour que nous entrions au gouvernement. Nous lui disions : Nous ne voulons pas entrer au gouvernement, nous n’avons jamais voulu un portefeuille ou une fonction. Nous disions et nous disons toujours : nous sommes un mouvement de résistance qui a choisi de défendre le pays, de protéger le Liban, la dignité des Libanais et des arabes. Nous sommes prêts à sacrifier nos vies pour retrouver la terre et les lieux sacrés. Nous vous demandons seulement deux choses : laissez-nous en paix, ne complotez pas contre nous, ne nous tuez pas et ne nous donnez pas des coups dans le dos. Nous ne voulons pas que vous nous protégiez, nous voulons simplement que vous ne complotiez pas contre nous.
Je l’ai dit à de nombreuses personnes : Nous voulons mourir au Sud. Nos jeunes viennent du Hermel, de Baalbeck pour mourir au Sud. Nous voulons être tués et vous vous moquez de nous et vous dites : ce sont des gens simples et pas très futés qui n’ont pas de projet politique. Notre projet est le martyr. Laissez-nous tomber en martyrs et ne nous tirez pas dans le dos. Laissez-nous êtres tués par des balles dans la poitrine, non dans le dos. Quand sommes-nous entrés en compétition pour une fonction, un portefeuille ou un gouvernement ?
De plus, nous leur avons toujours dit : occupez-vous des gens, de leurs problèmes et de leurs conditions de vie, surtout dans les régions défavorisées, au Akkar, dans la Békaa, à Tripoli. Or, qu’ont-ils fait pendant ces 5 dernières années pour ces régions ? Nous ne leur en demandions pas plus. Nous autres, nos esprits et nos yeux sont ailleurs. Nous ne cherchons pas le pouvoir. Certains vont dormir, nous autres, nous allons pour nous entraîner car nous pensons que de grands changements attendent la région, nous pensons que le danger israélien est imminent, que le peuple palestinien est menacé à l’intérieur de la Palestine, nous pensons que les lieux saints chrétiens et musulmans sont menacés car nous suivons ce qui se passe dans la région. Je le répète, nos cerveaux et nos cœurs sont ailleurs. Vous nous avez entraînés vers la scène interne car depuis 2005, vous vous êtes rendus à Washington et vous vous êtes engagés à ses côtés, et vous n’avez pas cessé de comploter contre la résistance. Même la conférence du dialogue avait pour but de désarmer la résistance. Ce projet a échoué. Vous avez alors appelé la guerre de 2006 pour en finir avec la résistance et vous avez encore échoué. Aujourd’hui, c’est au tour du projet du TSL de briser la résistance. Mais vous échouerez encore une fois et il échouera aussi.
Je le répète aujourd’hui : nous ne voulons pas le gouvernement. Au contraire, certaines parties au sein de l’opposition nous reprochent de ne pas vouloir le pouvoir. Elles nous critiquent dans les réunions privées et même parfois dans les médias. Au point que lors des élections de 2009, certains au sein de l’opposition nous ont accusés de ne pas avoir mené une campagne sérieuse car nous ne voulions pas le pouvoir…
Le plus gros mensonge et la plus grande fraude est d’accuser le Hezbollah de vouloir contrôler le pouvoir, l’Etat et le gouvernement. Au contraire, certains nous disent, le problème avec vous c’est que vous ne pensez qu’à la résistance et vous oubliez la situation interne. Lorsque vous y entrez c’est uniquement pour défendre la résistance. Nos alliés nous disent cela et nos adversaires nous accusent de vouloir prendre le pouvoir et exécuter un projet iranien ou perse. Nous sommes au milieu et je vous le dis tous ces propos n’ont aucun effet.
Au Hezbollah, nous avons une vision claire. Nous appuyons le PM Mikati et nous l’appelons à former un gouvernement de participation nationale et de sauvetage. Les Libanais se trouvent aujourd’hui devant une chance réelle de se rassembler. Il n’y a ni vainqueur, ni vaincu. Coopérons et retrouvons-nous au sein d’un même gouvernement. Si vous refusez de participer à ce gouvernement, cela signifie que vous voulez monopoliser le pouvoir et que vous êtes prêts à tout pour le prendre. Nous disons : ne trahissez pas la résistance et nous n’avons aucun problème avec vous. Nous avons beaucoup de réserves sur votre politique économique, financière et sociale, mais nous avions tenu à coopérer en pensant que nous pouvons trouver des solutions, sur base du fait que nous ne voulons pas éliminer qui que ce soit. Si vous ne participez pas à la formation d’un gouvernement de sauvetage national et si vous ne donnez pas une chance au Premier ministre Mikati, où voulez-vous entraîner le pays ?
Je vais être franc avec le camp adverse : le monde n’a pas le temps de s’occuper de vos affaires. Il y a actuellement plein de problèmes dans le monde et dans la région. Ne perdons donc pas de temps.
Quant aux menaces israéliennes qui se sont multipliées sous le titre que le Hezbollah contrôle le Liban, ne les écoutons pas. Car que peut faire Israël de plus qu’il n’a déjà fait ? De plus, est-ce le gouvernement qui protège le Liban, Ni le précédent, ni le prochain ne peuvent le faire. Les Etats-Unis et certaines positions régionales ne sont pas les défenseurs du Liban pour que nous ayons peur de les perdre.
Depuis longtemps, le Liban est livré à Israël. Avant 1978, en 1978 et en 1982, certains leaders palestiniens disaient en subissant les bombardements aériens israéliens : nous sentons l’odeur du pétrole arabe… Non, ce qui protège le Liban c’est sa résistance, son armée et son peuple. Ce qui empêche Israël d’attaquer le Liban, ce n’est pas la forme de son gouvernement, ni l’identité de son président, mais l’équilibre de la dissuasion établi par la résistance et que les sionistes eux-mêmes reconnaissent. N’ayez pas peur des menaces israéliennes, ne craignez aucun des discours qui se font entendre dans le monde. Nous pouvons surmonter cette période et c’est notre responsabilité à tous de saisir la chance qui s’offre à nous aujourd’hui. Ceux qui ne veulent pas participer au gouvernement, donnent quand même une chance au PM Mikati, même pour un an et après, qu’ils le jugent avec son gouvernement. Mais encercler le Premier ministre Mikati à travers les médias et la rue signifie que l’on refuse le jeu démocratique, l’alternance du pouvoir et le fonctionnement des institutions. Cela signifie simplement que l’on veut soi-même ou personne d’autre.
Frères et sœurs, que Dieu bénisse votre participation à cette commémoration si chère. Vous êtes grâce à Dieu Tout Puissant, les fils de cette voie et prêts aux mêmes sacrifices.
Je vous invite une fois de plus à la sagesse, à la patience et à la persévérance. Hussein continuera à vous appeler pour relever le défi israélien et affronter le projet américain ainsi que tous les despotes du monde. Aujourd’hui, nous voulons dire à notre imam que nous n’avons pas quitté les places et que nous faisons toujours entendre nos voix. Nous ne serons pas avares de notre sang et de nos sacrifices et notre voix continuera à résonner à travers l’Histoire et dans l’avenir criant: « Labbayka ya Hussein ».
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