Le Canada a suspendu le partage de métadonnées avec ses alliés

Le Canada a annoncé jeudi avoir suspendu le partage de métadonnées avec ses alliés des Fives Eyes car la vie privée de Canadiens a pu être compromise par la surveillance des communications effectuée par ses services de renseignement.
Le Canada forme, avec les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, le groupe des Five Eyes, une alliance de services de renseignement dont la puissance a notamment été mise en lumière par les révélations de l'ancien analyste de la NSA américaine, Edward Snowden.
Or, le Centre de la sécurité des télécommunications (CST, équivalent canadien de la NSA) a recueilli et transmis aux agences alliées une quantité non précisé d'informations sur des Canadiens à travers des interceptions de métadonnées, indique un audit annuel de cette agence dévoilé jeudi.
La loi interdit pourtant ce genre de pratiques sur le sol canadien et le partage des dites métadonnées a été suspendu en 2013 par le CST, souligne cet audit. Un responsable de cette agence a attribué les interceptions non désirées à un problème de logiciel.
Les métadonnées des télécommunications, qu'elles soient par téléphone ou internet, indiquent notamment l'heure, la durée ou encore le numéro appelé, mais pas, en principe, le contenu lui-même des échanges.
Certaines métadonnées recueillies par le CST renferment de l'information sur des Canadiens et le CST doit prendre des mesures pour protéger la vie privée dans le cadre de l'utilisation de ces métadonnées, a averti dans son audit Jean-Pierre Plouffe, Commissaire du CST, chargé de surveiller ses activités pour le Parlement.
Dans une lettre accompagnant ce rapport, le ministre canadien de la Défense, Harjit Sajjan a annoncé que le CST ne réactivera le partage de cette information qu'au moment où je serai entièrement satisfait de l'efficacité des systèmes et des mesures mises en place.
Le respect fondamental de la vie privée des Canadiens doit primer sur les besoins en renseignement des agences d'espionnage étrangères, a réagi dans un communiqué Laura Tribe, de l'ONG de défense d'un internet libre, OpenMedia, appelant à imposer un contrôle judiciaire sur les activités du CST.
Pour Mme Tribe, la suspension du partage des métadonnées annoncé jeudi devrait être la premier pas vers une étude plus large de la collecte et du partage d'informations entre les agences alliées.
Créé pendant la Seconde Guerre mondiale, le CST est la seule agence canadienne du renseignement à ne pas être encadrée par une loi. Elle emploie plus de 2.000 personnes à son siège d'Ottawa, ainsi que dans plusieurs ambassades canadiennes, où des centres d'interception électronique ont été établis en coordination avec les agences partenaires des Five Eyes.
Dans un autre rapport diffusé jeudi, les activités de l'agence canadienne de contre-espionnage, le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), ont également été passées au crible par le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS).
Là aussi, relève le CSARS, les métadonnées sont interceptées, utilisées et conservées par cette puissante agence.
Ce comité relevant du Parlement s'est donc interrogé sur la légalité de conserver toute communication recueillie fortuitement d'une personne autre que la cible, y compris vraisemblablement les métadonnées liées à la communication. Favorable à ce que ces données soient détruites, car obtenues en dehors du mandat judiciaire initial, le CSARS a donc recommandé au SCRS de détailler à la Cour fédérale les façons dont il utilise et conserve les métadonnées.
Publiée dans le rapport, la réponse des services secrets est sans appel: le SCRS estime la recommandation du CSARS inappropriée et injustifiée.
Source : agences
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