La plus grande catastrophe de l’histoire du football égyptien: 74 morts

Des heurts entre supporteurs de deux équipes ont fait au moins 74 morts et des centaines de blessés à Port-Saïd en Egypte. L'étrange attitude des forces de l'ordre est au centre de toutes les critiques.
Au moins 74 personnes sont mortes mercredi soir et des centaines ont été blessées dans des violences après un match de football entre deux équipes égyptiennes à Port-Saïd, dans le nord du pays, amenant l'armée à se déployer dans la ville.
La plupart des victimes ont été piétinées ou sont tombées des gradins lors de mouvements de panique. D'autres ont été tuées à l'arme blanche.
Les heurts ont commencé après que l'arbitre eut sifflé la fin du match au cours duquel Al-Masry , l'équipe locale a fait subir à Al-Ahly, l'une des équipes les plus titrées du football égyptien, sa première défaite (3-1) de la saison, à la 17e journée du championnat national.
"Des centaines de supporteurs d'Al-Masry, ont envahi la pelouse et se sont mis à poursuivre les joueurs et supporters adverses à coup de pierres, bouteilles et fusées éclairantes", ont déclaré des témoins et un photographe de l'AFP.
La télévision d'Etat égyptienne a montré des images de chaos dans le stade, des supporteurs courant dans toutes les directions. Des photos de joueurs en sang circulaient également sur internet.
"Ce n’est pas du football. C’est la guerre et des gens meurent sous nos yeux. Il n’y avait aucun dispositif de sécurité, pas d’ambulances", a réagi un joueur d'Al Ahli, Mohamed Abo Treika, interrogé par la chaîne de télévision de son club, en appelant à « l’annulation du championnat”. “C’est une situation horrible et on ne pourra jamais oublier la journée d’aujourd’hui", a-t-il poursuivi.
Ces événements ont par ailleurs eu des répercussions au Caire. À l'annonce des violences à Port-Saïd, l'arbitre d'un match entre Zamalek et Ismaïli a interrompu la rencontre, ce qui a conduit des supporteurs à incendier une partie du stade, a-t-on pu constater sur des images de télévision.
Dans un autre temps, la Fédération égyptienne de football a annoncé la suspension sine die de toutes les rencontres de première division après cet événement, qualifié de "plus grande catastrophe de l’histoire du football égyptien" par le vice-ministre de la Santé, Hecham Cheïha. "C’est malheureux et profondément affligeant", a-t-il ajouté.
Les magasins dans Port-Saïd ont baissé leurs rideaux, tandis que des particuliers aidaient à transporter les blessés dans leurs voitures. Des coups de feu ont été entendus sur la route menant de Port-Saïd au Caire.
"Le bilan s'élève à 74 morts, dont un policier", a indiqué le ministère de la Santé dans un communiqué, tandis que la télévision d'Etat annonçait le déploiement de l'armée dans cette ville à l'entrée nord du canal de Suez pour "éviter de nouveaux affrontements" entre supporteurs. Les affrontements ont également fait 248 blessés, a indiqué le ministère de l'Intérieur, après que la télévision eut parlé d'un millier de personnes blessées. Des hôpitaux ont fait état de centaines de blessés. La police a aussi indiqué avoir arrêté 47 personnes.
Le ministre de l'Intérieur Mohammed Ibrahim a assuré dans un communiqué que "la majorité des personnes tuées ont été écrasées" dans les mouvements de foule. Ce bilan, encore provisoire, en fait l'un des matches les plus meurtriers de l'histoire du football.
Le président de la Fédération Internationale de Football (FIFA), Sepp Blatter, s'est déclaré "très choqué" et a parlé d'un "jour sombre".
L'attitude des forces de sécurité à Port Saïd cristallise toutes les critiques. Si un petit groupe de policiers anti-émeutes a tenté de former une haie pour protéger les joueurs agressés, d'autres semblent s'être totalement désintéressés du drame qui se produisait devant eux.
“Les policiers anti-émeutes étaient présents en nombre suffisant, mais ils n'ont pas voulu s'interposer en raison de consignes de modération diffusées après des manifestations meurtrières au Caire en novembre et décembre derniers”, ont assuré les services de sécurité.
Dans ce contexte, le maréchal Hussein Tantaoui, chef du Conseil suprême des forces armées, qui a envoyé deux avions militaires à Port-Saïd pour évacuer les joueurs et les blésses, a insisté que “la sécurité de l'Egypte est bonne", en attendant leur arrivée sur un aéroport du Caire, a rapporté la télévision.
Les Frères musulmans, grands vainqueurs des dernières élections législatives, ont accusé les partisans du président déchu Hosni Moubarak d'être responsables des violences.
"Les événements de Port-Saïd ont été planifiés et sont un message des partisans de l'ancien régime", a affirmé le député Essam al-Erian, membre du parti politique de la confrérie.
Le président du Parlement Saad al-Katatni, membre des Frères musulmans, a indiqué que l'Assemblée du peuple tiendrait une session extraordinaire aujourd’hui jeudi.
De son côté, le vice-président de la Commission des Affaires étrangères du parlement égyptien, Wahid Abdel Mejid, a déclaré le ministre de l’Intérieur responsable de ces troubles.
« Le discours du ministre de l’Intérieur Mohammad Ibrahim au parlement montre que ce ministère est dirigé comme à l’époque Moubarak et que depuis la chute du régime, il n’y avait eu aucun changement”, a-t-il réitéré.
De même, le député libéral Amr Hamzawi a appelé au “limogeage immédiat du ministre de l'Intérieur, ainsi que du gouverneur et du chef de la sécurité de Port-Saïd”.
Les jeunes révolutionnaires craignent eux aussi que les partisans du président déchu Hosni Moubarak soient derrière cette tragédie, alors que la tension reste toujours vive un an après sa chute.
Des milliers de personnes se sont regroupées devant le siège de la télévision publique au Caire pour crier leur colère.
Une foule immense s'est également rassemblée à la gare centrale, d'où arrivent les trains en provenance de Port Saïd, scandalant «À bas le régime militaire!», tandis que certains partaient en direction de la symbolique place Tahrir.
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